mardi 31 août 2021

« L’immense dette des États-Unis », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité.



Depuis que les talibans ont pris Kaboul et que le retrait des forces américaines est programmé, il est de bon ton pour certains éditorialistes et observateurs de moquer la position des anti-impérialistes. « C’est bien la première fois que des communistes se plaignent du départ des Américains et regrettent le retrait des méchants impérialistes », raillent des beaux esprits… Souvent les mêmes qui expliquent qu’il est impossible, voire dangereux, d’accueillir ces Afghanes et ces Afghans qui risquent leur peau.

Sur les vingt dernières années, les États-Unis ont lâché des centaines de milliards de dollars pour l’Afghanistan. Cet argent n’a produit aucune amélioration significative de la vie de la grande majorité des Afghans. Il n’a pas été utilisé pour le développement ou la modernisation du pays. Cet argent n’a servi qu’à financer la guerre et l’occupation. C’est bien parce que l’intervention américaine était pensée dans une logique impérialiste que les vingt années d’occupation n’ont pas permis de faire émerger une alternative démocratique dans le pays et ont étouffé toute perspective progressiste qui aurait pu gêner les plans, des différentes administrations états-uniennes. Le moins que l’on puisse attendre d’eux aujourd’hui, c’est qu’ils assurent l’évacuation de ceux qui leur ont rendu service mais aussi de celles et ceux qui sont menacés du fait de leur profession ou de leur opinion. Ce que l’on peut exiger des pays occidentaux, à commencer par les membres de l’Otan, c’est qu’ils assument un accueil digne de toutes ces personnes contraintes à l’exil.

Ces milliards de dollars sont, en réalité, une dette que les États-Unis ont envers le peuple afghan. Car les Afghans ne sont pas voués à subir des régimes autoritaires, obscurantistes et théocratiques. Des forces démocratiques et progressistes existent. L’avenir de ce pays repose sur ces milliers de femmes et d’hommes qui depuis leur exil ou dans leur pays vont lutter pour ouvrir d’autres voies pour l’Afghanistan. Ce sont eux qu’il ne faut pas abandonner. Ce sont eux que nous recevrons à la Fête de l’Humanité cette année.

 

« Rentrée », le billet de Maurice Ulrich.

 


Vaccinés, QR code dans le smartphone, voilà déjà les bases d’une rentrée heureuse… À part les catastrophes naturelles, les talibans, l’épidémie en Guadeloupe et en Martinique, les étoiles jaunes dans les manifs et Zemmour candidat, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Avec quelques bonnes nouvelles en plus. Lionel Messi a rejoint le PSG, Michel Onfray s’est converti à la messe en latin qu’il trouve seule digne de sa conception de la grandeur de l’homme et du sacré, et, mais oui, c’est possible, Benjamin Griveaux a retrouvé du travail. L’ancien porte-parole du gouvernement et candidat à la mairie de Paris qui vivait en retrait après s’être mis, si l’on ose dire, un peu trop en avant, va être consultant pour les entreprises, sans doute sur les questions de vidéo, et animateur d’une émission mensuelle sur une chaîne de télé économique. Il en a bien sûr, dit-il, averti Emmanuel Macron, qui devrait retenir l’épisode dans sa lutte contre le chômage. On peut traverser la rue pour trouver du travail mais il faut aussi faire valoir ses atouts.

 

lundi 30 août 2021

PCF. Présidentielle, une rentrée dans les starting-blocks pour les communistes

 



Julia Hamlaoui

L’université d’été du PCF à Aix-en-Provence a été l’occasion pour Fabien Roussel de marteler ses priorités pour une élection à laquelle il participe « pour gagner ». Emploi, pouvoir d’achat, jeunesse et écologie seront, dans les semaines à venir, au menu des communistes qui partagent l’enthousiasme de leur candidat. La création de « comités locaux pour les Jours heureux » a également été annoncée.


Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), envoyée spéciale.

Trente-deux semaines, soit 225 jours très précisément. Le candidat communiste à l’élection présidentielle n’a pas manqué de faire le compte du temps imparti d’ici le premier tour pour « relever le défi des jours heureux », samedi, lors de l’université d’été du PCF qui a réuni à Aix-en-Provence quelque 500 militants venus de toute la France. « Nous n’allons pas à cette élection pour faire de la figuration, nous y allons pour gagner, pour diriger le pays, pour redonner le pouvoir aux citoyens, au monde du travail », a lancé Fabien Roussel à ses troupes, assurant voir « grandir l’intérêt pour notre candidature » qui n’a rien d’une « aventure personnelle ».

 

Pour cette rentrée, les communistes poursuivent « deux objectifs », précise Igor Zamichiei, membre de la direction : « Progresser sur l’identification de notre candidature, et avancer aussi sur le rassemblement autour de celle-ci », explique le responsable départemental de Paris, assurant que dans les mois à venir emploi, jeunesse et écologie seront à l’honneur.

L'emploi au cœur  de la campagne

Dès ce week-end, le candidat du PCF l’a martelé : « Je veux être le président du pouvoir d’achat, de la lutte contre la vie chère et en faire une priorité nationale ». Lors de son discours, le gouvernement en a pris pour son grade. « Le ministre de l’Économie et des Finances a beau dire que la croissance est de retour, franchement ce que voient les gens c’est la croissance des factures, par contre les salaires et les pensions c’est au ras des pâquerettes », tacle Fabien Roussel. Comme il le fait dans son livre Ma France (Éditions Le Cherche midi) le secrétaire national illustre son propos de situations puisées dans ses rencontres.

 

Il rapporte ainsi le témoignage d’une caissière à temps plein payée 1 280 euros par mois après douze ans d’ancienneté rencontrée quelques heures plus tôt avec ses collègues de Carrefour, ou encore celui de Danièle, désormais retraitée dont la pension d’élève à 920 euros. Or « la France est riche, très très très très riche », assène le député du Nord, ciblant les 500 plus grosses fortunes dont « le patrimoine pendant le quinquennat Macron a doublé », pour atteindre « 1 000 milliards », ou les profits du « CAC 40 (qui) sabre le champagne » avec « en pleine crise 60 milliards de dividendes ».

« Nous allons mettre l’emploi au cœur de la campagne », promet le candidat qui, loin de miser sur les « premiers de cordées de Macron qui nous tirent vers le bas », plaide pour « un changement total de l’utilisation de l’argent », pour « s’attaquer au capitalisme prédateur » et « donner le pouvoir aux salariés dans les entreprises ».

Avec l’objectif de parvenir à « l’éradication du chômage », une série de propositions est mise sur la table : Smic à 1 800 euros brut, suppression de la CSG pour les retraités, 1 200 euros de pension minimum, réduction du prix du gaz et de l’électricité avec une « nationalisation tout de suite d’EDF et GDF ». Ou encore des « peines planchers » pour « les fraudeurs fiscaux ». Aux côtés de cette priorité, figure aussi « la révolution écologique »« Le problème avec le capitalisme vert ce n’est pas la couleur, c’est le capitalisme », sourit Fabien Roussel, qui résume l’enjeu comme un « choix de civilisation : la finance ou l’existence ».

Priorité à la jeunesse

Dans les couloirs de la fac de lettres qui accueille l’université d’été, le parcours de certains participants aurait pu trouver leur place parmi les histoires de vie racontées par le candidat. « Je suis boursier, je n’ai que 460 euros par mois, 20 euros de plus dans le loyer, plus l’électricité et le gaz qui augmentent, pour moi c’est compliqué », raconte Kilian, un étudiant toulousain. D’ailleurs, « la jeunesse sera un sujet incontournable de 2022, Emmanuel Macron ne s’y trompe pas notamment avec sa garantie jeune universelle qui n’est clairement pas à la hauteur », pointe Léon Deffontaines, dirigeant des Jeunes communistes (MJCF) lors d’un débat avec Maryam Pougetoux, la vice-présidente de l’Unef. Une question que les communistes comptent aussi mettre en avant en proposant un « pacte pour la jeunesse » avec, notamment, un « revenu étudiant au-dessus du seuil de pauvreté », rappelle le secrétaire général du MJCF. « Pour moi cette proposition, c’est tout simplement la perspective de sortir de la précarité », assure Kilian.

Le jeune militant de vingt ans est aussi enthousiaste pour la campagne qui s’annonce que son candidat : « On est là pour être majoritaire et gagner », affirme-t-il, conscient toutefois que le défi est de taille alors que les sondages attribuent pour l’heure moins de 5 % au PCF. Mais « le scénario promis en septembre n’est jamais celui qui se réalise en avril », glisse Sébastien Laborde, de la fédération de Gironde.

De son côté, Martin, étudiant marseillais, est un peu plus pessimiste : « Si quelqu’un de gauche gagne, ce serait quand même un miracle… Entre Roussel, Mélenchon, on va voir comment les choses tournent mais je suis un peu désespéré », regrette le tout nouveau militant qui a adhéré il y a moins d’un an. La plupart de ses camarades se lancent cependant avec optimisme. À l’instar de Catherine La Dune, fraîchement élue en région Nouvelle Aquitaine : « Puisqu’on a réussi aux régionales à avoir davantage d’élus, j’ai pas mal d’espoir aussi pour Fabien Roussel, au moins pour avoir de la visibilité, et ça commence à marcher ».

Rassembler jusqu'au-delà de la gauche

Le climat n’en est pas moins inquiétant, selon Mireille, qui patiente dans le plus grand des amphis en compagnie d’Henri, avant la tenue de leur atelier. L’enseignante à la retraite pointe la « confusion » ambiante alimentée par la crise sanitaire et une « énorme méfiance dont l’extrême droite profite pour faire des amalgames crapuleux », notamment via un discours antisémite lors des manifestations anti-passe. 

Alors, dans les travées des amphis aixois, on en est plutôt persuadé : l’enjeu numéro un, c’est de convaincre les déçus, les désabusés de la politique, les abstentionnistes. « Nous devons, plaide Fabien Roussel, rassembler bien au-delà de notre électorat, au-delà même de la gauche, il faut voir loin, aller toucher tous ceux qui ne votent plus. » Mais comment ?

« Il faut mettre en avant nos propositions, notamment les lois déposées par les communistes comme celle pour la sécurité de l’emploi et de la formation », avance Henri, venu de l’Aisne, quand Mireille croit nécessaire de démontrer concrètement l’utilité des communistes, comme « la façon dont le député André Chassaigne s’est battu pour faire revaloriser les retraites agricoles »« C’est une absence de près de vingt ans du parti, il faut bien reconstruire, retrouver notre électorat, c’est un travail de longue haleine mais qui sera payant », complète Kilian de son côté.

Pour un pacte aux législatives

Quant au reste de la gauche, Fabien Roussel a renouvelé, samedi, la proposition d’un « pacte d’engagements communs » aux législatives pour « bâtir une large majorité de gauche à l’Assemblée nationale ». Car sa candidature, promet-il, vise à « contribuer à créer les conditions d’une nouvelle majorité politique ». Passage à l’acte dès ce week-end, avec l’un des ateliers consacrés aux retraites auquel Caroline Fiat (FI) et Alain Coulombel (EELV) ont participé. « Je ne crois pas à la possibilité d’emporter une majorité parlementaire si nous ne gagnons pas la présidentielle, et nous n’y arriverons pas avec cinq candidats », lâche à cette occasion le porte-parole des écologistes, plaidant pour « se retrouver très vite autour d’une table pour se mettre d’accord sur 15-20 propositions ». L’écologiste reconnaît toutefois qu’il ne fait pas l’unanimité, y compris dans son parti.

Son avis est d’ailleurs loin d’être partagé par le secrétaire national du PCF : « Le problème de la gauche ce n’est pas la division, c’est de faire en sorte que la somme des candidats de gauche fasse 50,1 %, assure Fabien Roussel. Il faut s’attaquer aux raisons pour lesquelles elle plafonne à 20 %, sinon on ne l’emportera jamais. Elle est faible d’abord de ses renoncements et trahisons lorsqu’elle était au pouvoir, elle l’est aussi de son incapacité à s’adresser au monde du travail, à la jeunesse. »

Rendez-vous à la Fête de l'Humanité

En la matière, les bouleversements engendrés par la pandémie pourraient aider. « L’expérience que nous traversons casse, abîme, contrarie l’idéologie dominante, étouffoir de l’action populaire », assure le directeur de l’université d’été, Guillaume Roubaud-Quashie, en référence aux dogmes libéraux – de l’efficacité des marchés à la réduction de la dépense publique – mis en cause ces derniers mois. Mais il s’agira avant tout de passer à l’action sans attendre.

« Créons partout, dans nos communes, les villes, les villages, sur les lieux de travail, dans les universités, des comités locaux pour les jours heureux », invite Fabien Roussel, tout en appelant à désigner « dès maintenant » des candidats aux législatives. Un « grand rassemblement national » pour l’emploi et le pouvoir d’achat est également prévu le 20 novembre à Paris, précédé « d’une semaine d’action dans tout le pays du 9 au 16 octobre ».

En attendant, le prochain rendez-vous aura lieu du côté de La Courneuve, à la Fête de l’Humanité, où Fabien Roussel tiendra un meeting le samedi 11 septembre à 17 heures.

 

Le « plan » de Fabien Roussel pour Marseille

À quelques jours du déplacement d’Emmanuel Macron à Marseille, où il présentera son « grand plan » pour la ville, Fabien Roussel a évoqué la situation de la cité phocéenne à proximité de laquelle s’est déroulée l’université d’été du PCF. « Quand nous découvrons qu’un enfant de 14 ans a été tué dans des règlements de comptes liés à des trafics de drogue et qu’un autre de 8 ans a été blessé par balle, nous devons penser à eux », a commencé le député. « Darmanin peut mettre tous les policiers qu’il veut, mais tant qu’il n’y aura pas de moyens dans l’école, tant qu’on n’ouvrira pas des musées, des équipements sportifs, tant qu’il n’y aura pas d’éducateurs, tant que nous ne ferons pas entrer la République dans ces quartiers, nous n’y arriverons pas !  » a-t-il ensuite lancé, tout en affirmant la nécessité de « s’attaquer aux gros bonnets de la drogue », dont « le roi du Maroc (qui) au cœur de l’été a décidé de légaliser la culture du cannabis ».

Lire aussi : Narcocriminalité. « Marseille est le miroir grossissant de la France »

 

« Reconquête, l’éditorial de Maurice Ulrich dans l’Humanité



Il est apparu de blanc vêtu comme un chevalier vertueux appelé à sauver la France d’une invasion des Sarrasins. Éric Zemmour, délinquant multirécidiviste, a fait le buzz au moment où la droite se penche sur elle-même, prise entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Primaire ou pas primaire… Dilemme, etc. Mais alors que la campagne pour l’élection présidentielle est sur les rails, force est de le constater, les thématiques exacerbées de la droite et de l’extrême droite préemptent le débat public, y compris de manière symptomatique quand un Florian Philippot refait surface… Immigration avec maintenant l’instrumentalisation éhontée de la crise afghane, sécurité, laïcité dévoyée… Mais, sur le fond, cela se joue aussi sur le terrain social quand le ministre de l’Économie vient cajoler le Medef, quand la réforme de l’assurance-chômage est appelée à péna­liser les plus fragiles et quand les régressions sociales usurpent le nom de « réformes ». 

La gauche est divisée. On peut le regretter mais cela ne sert à rien. L’hypothèse d’une candidature de rassemblement semble bien caduque, sauf événement, et l’on ne peut faire grief aux candidats de caresser l’espoir de renverser la table en parvenant au second tour, voire plus. Se porter candidate ou candidat c’est prétendre à être élu, quels que soient les vents contraires. Mais ça souffle. La gauche dans son ensemble est en grande difficulté, avec un total estimé d’à peine plus de 20 %. Comme l’a rappelé Fabien Roussel ce week-end, le problème aujourd’hui n’est pas tant les diverses candidatures que ces 20 % qui témoignent à l’envi du décalage entre les attentes des couches populaires, parfois dévoyées, et les réponses de la gauche ou, si l’on préfère, des gauches et des écologistes. Il y a urgence à retrouver le contact, à regagner du terrain dans la bataille des idées. Un combat des gauches serait mortifère. Leurs candidats ont le devoir d’être partenaires, quelles que soient leurs différences, voire leurs différends. C’est à cette reconquête de l’opinion autour du progrès social et environnemental, de la fraternité et du partage que l’Humanité entend s’employer. Prochaine étape, la Fête.

 

Fête de l’Humanité. Vive la Commune du livre et des idées !

 


Pierre Chaillan

Le Village du livre, rendez-vous des auteurs, des éditeurs et des mouvements d’éducation populaire, proposera une dense programmation en ce 150e anniversaire de la Commune de Paris.

C’est un plaisir en cette rentrée littéraire et politique. Après une année sous contraintes, le Village du livre reprend ses aises en s’ouvrant à nouveau à un large public (dans le respect des gestes sanitaires, bien sûr), et ce pour une dernière fois à La Courneuve. Une année bien particulière, donc, mais dans un lieu où les fondamentaux, eux, bien vivaces, seront cultivés.

Retrouvez tous nos articles consacrés à la Fête de l’Humanité 2021.

Il y aura toujours les milliers de livres à découvrir, les dizaines de rencontres à vivre avec les auteurs, les éditeurs, les revues et les mouvements d’éducation populaire et du partage des savoirs et des connaissances. Ce sera le moment de se procurer l’ouvrage de son choix et de le faire dédicacer par son auteur préféré.

Les 40 ans de la loi Lang

Durant trois jours, au programme, concocté avec nos différents partenaires, il y aura des cartes blanches à ne pas rater ( Monique Pinçon-Charlot, Émilie Aubry, Stan Neumann, Samira Sedira, Werner Rügemer) et des rencontres à faire au coin de chaque stand.

Le samedi, à 14 heures, l’échange autour du livre et de la culture, ce bien commun, à l’occasion des 40 ans de la loi Lang, fera événement et sera suivi des rencontres avec les auteurs de premiers romans, du livre jeunesse, de l’édition féministe.

Le dimanche, la rentrée littéraire, le roman noir et les polars seront à l’honneur, et le prix Bulles d’Humanité de la bande dessinée citoyenne sera remis par notre jury à 15 heures.

Les questions d’actualité seront largement abordées. La crise sanitaire sera au centre d’une confrontation entre Patrick Pelloux, Marie-Monique Robin et Jean-Paul Jouary. La gauche fera l’objet d’une discussion entre Stéphanie Roza, Edwy Plenel, Aurélie Trouvé et Jean-Numa Ducange.

Au Café des auteurs

Le lieu prendra alors des airs de Commune. L’espace Débats, avec la Librairie de la Renaissance, où les auteurs dédicaceront leurs ouvrages à l’issue de chacun des échanges, fera battre le cœur de la petite République des livres, de la culture, des savoirs et des idées. Il sera entouré par l’espace Éditeurs et Partenaires (revues, instituts, fondations…).

Nouveauté : un lieu convivial, le Café des auteurs, fournira la respiration nécessaire à ce lieu plein de vie. Et en soirée, le cinéma remplacera le livre pour des projections et des avant-premières à l’espace Débats.

Les enjeux du commun

De la Commune, vendredi, au communisme, dimanche, en passant par le commun, samedi. Comme un fil conducteur qui relie les débats. Le Village du livre ouvrira sous l’égide du 150e anniversaire de la Commune. En partenariat avec Arte et les Amies et Amis de la Commune de Paris de 1871, l’inauguration officielle sera l’occasion de dévoiler l’exposition « Les damnés de la Commune », en compagnie de son auteur, Raphaël Meyssan, de l’historien Roger Martelli et de nombreux autres contributeurs du hors-série édité par l’Humanité.

Le samedi, près d’une quinzaine de rencontres poseront les enjeux du commun de notre monde et des combats actuels, vingt ans après le 11 septembre 2001.

Le dimanche, le communisme sera à l’ordre du jour avec plusieurs temps forts : sur la justice sociale avec Fabien Roussel, qui publie Ma France, en dialogue avec Éric et Alain Bocquet, puis sur le libre développement de l’individu, sur l’histoire de la Résistance, et enfin sur l’énergie.

► Pour soutenir la Fête de l’Humanité, commandez vos bons de soutien !

 

vendredi 27 août 2021

« Complicité », l’éditorial de Laurent Mouloud dans l’Humanité.



Pour un peu, Geoffroy Roux de ­Bézieux nous aurait tiré une larme. Dans son discours d’ouverture de l’université d’été du Medef, mercredi, le président de l’organisation patronale n’avait que douceurs et hommages à adresser à Bruno Le Maire. Ce « cher Bruno » qui, depuis dix-huit mois, a « toujours été avec nous ». Ce à quoi le ministre de l’Économie, le rose aux joues, a répondu par un « immense merci aux entrepreneurs de France : nous leur devons tout ». Touchant et glaçant. Car nos deux larrons en foire n’étaient pas venus que pour s’échanger des amabilités. Mais surtout pour tracer, en parfaite complicité, le scénario économique de cette sortie de crise espérée. Scénario qui se résume en deux points : la fin du « quoi qu’il en coûte » et une facture présentée aux salariés.

Depuis le début de la crise sanitaire, plus de 80 milliards d’euros ont été engagés par l’État pour soutenir les entreprises, à coups d’exonérations de cotisations sociales et autre chômage partiel. Chiffre auquel s’ajoutent 140 milliards de prêts bancaires garantis. Une avalanche d’aides publiques déversées sans aucune contrepartie. Utile pour maintenir la tête hors de l’eau de nombreuses PME, mais également vampirisée, pour une bonne part, par les mastodontes du CAC 40. Artificiellement dopés, leurs profits n’en finissent plus d’exploser (+ 41 % au premier semestre par rapport à 2019). Tout comme les dividendes versés aux actionnaires.

Aujourd’hui, le robinet des aides se ferme. Le Medef est gavé et, toute honte bue, tente de faire payer la note à l’ensemble des Français en poussant le wagon des réformes antisociales préparées par le gouvernement. À commencer par celle de l’assurance-chômage, dont le nouveau mode de calcul des allocations va frapper au portefeuille les travailleurs précaires, et celle des retraites, avec un nouveau report de l’âge de départ. Pas un mot sur les moyens de l’hôpital ou la question des salaires. Ce mercredi, seuls comptaient les désirs de Roux de Bézieux, que Le Maire semblait déjà prendre pour des réalités.

 

PCF Une rentrée tous azimuts pour faire « décoller » la candidature Roussel

 


Julia Hamlaoui

De Malo-les-Bains à Aix-en-Provence, où se déroule leur université d’été jusqu’à dimanche, les communistes multiplient les initiatives. Avec la jeunesse, le travail et les salaires comme priorité.

Après un été bien occupé, le PCF est dans les starting-blocks en cette rentrée. 2022 en ligne de mire. « Avec la quarantaine d’étapes de notre caravane estivale, l’enjeu des deux derniers mois a été d’installer la candidature de Fabien Roussel, celui des semaines à venir est maintenant de la faire décoller », explique Ian Brossat, le porte-parole de la formation. Un enjeu de taille alors que les sondages le placent, pour l’heure, sous la barre des 5 %. Le programme est donc chargé.

La dernière étape de la Caravane des jours heureux à peine bouclée jeudi, à Malo-les-Bains (Nord), par une journée de solidarité avec les oubliés des vacances, le secrétaire national du PCF doit prononcer un nouveau discours, samedi, à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), lors de l’université d’été de son parti qui se tient jusqu’à dimanche. Il s’agira de mettre sur la table ses priorités, assure son entourage. À commencer, au-delà des enjeux sanitaires, par le pouvoir d’achat et l’avenir de la jeunesse. « Face à un Medef qui chouine parce que les entreprises n’arrivent pas à embaucher et qui, dans le même temps, refuse toute augmentation générale des salaires, la question du travail, et de sa rémunération est centrale pour nous », détaille Ian Brossat.

Un « pacte » écrit « avec des milliers de mains »

Quant à la jeunesse, elle est à l’honneur dans l’ouvrage que présente Fabien Roussel en cette rentrée : Ma France (éditions le Cherche midi). Il y développe l’idée d’un « pacte » écrit « avec des milliers de mains » et présente ses propositions, allant d’un revenu étudiant à une garantie de l’emploi. Un grand rassemblement doit aussi se tenir à Paris, le 20 novembre, pour l’emploi et l’industrie, a annoncé Fabien Roussel jeudi, affirmant vouloir « protéger le travail des Français, réindustrialiser la France, redonner les moyens à nos services publics ».

D’ici là, les quelque 500 militants attendus à Aix se frotteront à des dizaines d’ateliers pour se préparer au mieux. « Chez nous, les universités d’été ont d’abord et avant tout un rôle de formation, la vraie rentrée populaire des communistes, c’est évidemment la Fête de l’Humanité, qui rassemblera des dizaines de milliers de personnes », rappelle Ian Brossat. En attendant, samedi, une rencontre avec EELV, la FI et le PS est également prévue. « Nous traçons notre sillon, mais cela ne nous empêche pas de continuer à débattre avec d’autres parce que, notamment dans la perspective des élections législatives, l’objectif est de travailler à une future majorité de gauche à l’Assemblée nationale », assure le porte-parole. Pour le candidat communiste, l’essentiel est d’ailleurs de s’adresser à ceux que la gauche ne convainc plus car, estime Fabien Roussel, « le problème d’une gauche à 20 % et cinq candidatures, ce sont les 20 %, pas les cinq candidatures ».

 

Rentrée politique. La gauche a huit mois pour déjouer les pronostics

 


Emilio Meslet

Données perdantes par les sondages, les formations progressistes entrent, avec leurs universités d’été, dans la dernière ligne droite vers une présidentielle à haut risque.

Le 10 avril 2022, c’est le rendez-vous fixé le 13 juillet par le Conseil des ministres : date du premier tour de l’élection présidentielle. Il y a déjà pléthore de prétendants. Les quatre principales formations politiques de gauche - PCF, EELV, PS, et FI (lire ci-contre) - auront toutes un candidat d’ici à la fin de septembre, sans compter l’aventure solo d’Arnaud Montebourg. Et, pour le moment, la météo électorale ne leur prédit rien de mirobolant. Selon le dernier sondage en date, celui d’Harris Interactive pour Challenges, l’insoumis Jean-Luc Mélenchon reste le mieux placé (11 %), devant la socialiste Anne Hidalgo (7 %), l’écologiste Yannick Jadot (6 %) et le communiste Fabien Roussel (2 %). En l’état, aucun progressiste n’est en mesure d’atteindre seul le second tour. Rien de nouveau, mais le temps presse, alors que certains croient toujours dans l’éventualité d’un rassemblement.

Après des régionales qui n’ont pas permis de clarifier les rapports de forces à gauche, le compte à rebours pour 2022 est donc officiellement lancé. Première étape : les traditionnelles universités d’été. Si les Verts se sont réunis la semaine dernière à Poitiers avant leur primaire, le PCF, la FI et le PS tiennent leur rendez-vous annuel ce week-end, respectivement à Aix-en-Provence, Valence et Blois. L’occasion de se mettre en ordre de bataille avant le scrutin d’avril tout en travaillant les questions programmatiques.

Il reste maintenant huit mois à la gauche pour créer une dynamique lui permettant de contrecarrer le duel annoncé Macron-Le Pen. Pour cela, il faudra affronter un calendrier de rentrée à haut risque : rentrée scolaire périlleuse en raison du Covid, rentrée sanitaire avec les manifestations anti-passe et la quatrième vague, et rentrée sociale avec l’entrée en vigueur de la réforme de l’assurance-chômage. Sans parler du débat politique monopolisé depuis des mois par la droite et l’extrême droite sur les thématiques d’immigration, de sécurité et de laïcité. Un défi de taille - mais pas impossible - pour une famille politique dont les candidats s’apprêtent à s’élancer chacun dans son couloir. 3… 2… 1…

Arnaud montebourg entrera en course le 4 septembre

Jamais deux sans trois. Après avoir échoué aux primaires socialistes de 2011 et 2017, Arnaud Montebourg va se lancer à la conquête de l’Élysée, avec le soutien du Mouvement républicain et citoyen (MRC) du souverainiste Jean-Pierre Chevènement. L’ancien ministre du Redressement productif devrait officiellement se déclarer le 4 septembre. Mais le chantre de la réindustrialisation a déjà laissé quelques indices sur la tonalité d’une campagne qu’il conçoit pour « réinventer la proposition de la gauche ». Sa recette ? « Une politique mixte » car « le pays est à droite sur le régalien et à gauche sur l’économique et social ». Tout un programme.

 

Coupe du monde 2022. Des milliers de morts suspectes sur les chantiers qataris



Nadjib Touaibia

Venus majoritairement d’Asie, des milliers d’employés migrants laissent leur vie dans la construction d’infrastructures. L’ONG Amnesty demande au Qatar d’enquêter sur les circonstances des décès.

L’organisation de défense des droits humains Amnesty International épingle le Qatar pour les morts inexpliquées par milliers sur les grands chantiers de la Coupe du monde de football en 2022. « Les autorités qataries ont omis d’enquêter sur la mort de milliers de travailleurs migrants survenue au cours de la dernière décennie, malgré des preuves établissant un lien entre les décès prématurés et les conditions de travail dangereuses », affirme l’ONG, jeudi 26 août, dans un communiqué à la veille de la publication d’un rapport.

Ce texte pointe les pratiques du Qatar attribuant systématiquement les décès à des « causes naturelles » ou à des « insuffisances cardiaques ». Dans 70 % des cas, les motifs ne sont pas déterminés, selon Amnesty, qui s’appuie sur l’analyse de registres dans les pays d’origine des migrants décédés.

Sur le terrain, l’application des mesures se fait attendre

« Nous ne sommes pas d’accord avec la position qu’adopte Amnesty à l’encontre du Qatar. L’impact positif des réformes relatives à l’emploi est clair pour tous » , dit un porte-parole du gouvernement qatari dans un communiqué. Il évoque des « réformes majeures », dont l’établissement d’un nouveau salaire minimum, la fin des permis de sortie, de meilleurs logements ou encore l’amélioration des règles de sécurité.

Ces mesures se font toutefois longtemps attendre sur le terrain. Le statut de forçats imposé aux milliers de migrants demeure la réalité sur de nombreux chantiers.

Venus majoritairement d’Asie, ces travailleurs subissent un traitement qui s’apparente à de l’esclavage régulièrement dénoncé par des ONG. Plus de 6 500 employés ont laissé leur vie lors de la construction des stades et infrastructures, selon des révélations du Guardian. Doha dément l’information du quotidien britannique mais refuse de rendre public le nombre exact de morts. Contraints à travailler entre 66 et 77 heures hebdomadaires dans une chaleur caniculaire, ces ouvriers logent dans des abris de fortune. Privés de leur passeport confisqué dès leur arrivée, ils sont condamnés à accepter ces conditions insupportables, à la merci de leurs employeurs.

La responsabilité des multinationales et de la Fifa

Dans une tribune publiée dans le Monde le 26 juin, des élus et des dirigeants associatifs demandent à ce que les entreprises qui interviennent soient soumises à une obligation concrète de vigilance. Ils rappellent la responsabilité des multinationales et de la Fifa, « qui tirent profit de l’exploitation des hommes et de la destruction de l’environnement sous le prétexte du sport ». Ils appellent à tirer les leçons « de l’application de la loi française du 27 mars 2017 (…) relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre ».

 

Asie centrale. Les Afghans abandonnés en plein cauchemar



Pierre Barbancey

Deux explosions à Kaboul ont fait, jeudi, des dizaines de morts parmi les milliers de familles bloquées aux portes de l’aéroport, dans l’attente de quitter le pays. La France devait cesser les évacuations ce vendredi, les autres pays avant mardi.

« On est entrés ensemble et on part ensemble ». À écouter Joe Biden, qui s’exprimait ainsi le 20 août, l’évacuation étrangère se passerait dans les meilleures conditions. 88 000 personnes ont été emmenées hors d’Afghanistan depuis la mise en place du pont aérien le 14 août, à la veille de l’entrée des talibans dans Kaboul et de leur prise du pouvoir, selon la Maison-­Blanche. Elles seraient près de 60 000 du seul fait des États-Unis, si l’on en croit le général Hank Taylor de l’état-major américain. Les opérations se sont intensifiées ces dernières heures : près de 19 000 personnes, au total, ont été exfiltrées entre mardi et mercredi, dont 11 200 par les États-Unis et 7 800 par les autres pays. Des scènes similaires ont également lieu à la frontière de Spin Boldak, dans le sud du pays, non loin de Kandahar.

Le compte à rebours à commencer alors que les incertitudes demeurent, après la confirmation du président américain, Joe Biden, de la fin des évacuations la semaine prochaine. Des milliers d’Afghans, angoissés, sont massés depuis des jours devant l’aéroport de la capitale, sécurisé par plus de 6 000 soldats états-uniens, dans une atmosphère tendue. Certains y campent par familles entières. Parmi ces dizaines de milliers de personnes, beaucoup ont fui parce qu’elles craignaient pour leur vie pour avoir travaillé pour le gouvernement déchu, des forces ou des civils occidentaux au cours des vingt ans de guerre.

Daech suspecté de l’attentat

Tous espèrent arriver à entrer dans le complexe et à prendre un avion. Mais, même ceux qui ont une autorisation ne parviennent pas à faire valoir leur droit. Un professeur de l’université de Kaboul, que nous avons pu joindre par téléphone, est ainsi bloqué avec toute sa famille. Les soldats américains l’empêchent d’entrer si une personne de l’ambassade du pays supposé l’accueillir ne vient pas le chercher. Mais les communications sont d’autant plus compliquées que les personnels diplomatiques sont eux-mêmes rapatriés au fur et à mesure.

Comme si la confusion n’était pas assez forte, la France, ainsi que les Pays-Bas, a annoncé qu’elle mettrait fin à ses vols ce vendredi soir. Cette date butoir est «  imposée par les Américains », prétend le Premier ministre français, Jean Castex. Plusieurs pays occidentaux ont appelé leurs ressortissants à s’éloigner au plus vite de l’aéroport de Kaboul en raison de menaces « terroristes » et, plus précisément, de l’organisation dite de l’« État islamique » (EI), Daech. L’EI est suspecté d’être à l’origine des deux explosions qui ont fait des dizaines de morts, jeudi après-midi, près du tarmac. Peu après la proclamation par Daech d’un califat en Irak et en Syrie en 2014, d’anciens membres du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP, les talibans pakistanais) ont prêté allégeance au chef du groupe, Abou Bakr Al Baghdadi. Ils ont ensuite été rejoints par des Afghans déçus par les talibans et ayant fait défection. Début 2015, l’EI a officiellement reconnu la création de sa province (wilaya) du Khorasan : l’ISKP (« État islamique » province du Khorasan). Bien qu’affaibli, cette branche de l’EI possède des cellules dormantes dans plusieurs villes afghanes, dont Kaboul.

Joe Biden tient son cap

La Belgique a cessé ses activités depuis mercredi. La Turquie, quant à elle, a annoncé le retrait de ses soldats, qui gardaient l’aéroport de Kaboul au côté des militaires états-uniens, abandonnant ainsi sa proposition de continuer à en assurer la sécurité après l’évacuation des forces étrangères.

Le chef de la diplomatie des États-Unis, Antony Blinken, a assuré, mercredi, que les talibans se sont engagés à laisser partir les Américains et les Afghans à risque encore dans le pays après le 31 août. Mais il n’a pas spécifié comment leur départ s’effectuerait. Lors d’un sommet virtuel organisé mardi avec les autres dirigeants du G7, Joe Biden a écarté l’idée de prolonger au-delà du 31 août la présence militaire américaine. Pour que le retrait soit effectif ce jour-là, il faudra avoir interrompu les évacuations plus tôt, les États-Unis devant rapatrier leur dispositif militaire. Visiblement, la rencontre organisée lundi entre William Burns, chef de la CIA (une agence de renseignement), et le mollah Abdul Ghani Baradar, nouvel homme fort du régime, n’a pas donné grand-chose. En tout cas dans ce domaine. Les États-Unis, suivant en cela leur feuille de route contenue dans l’accord passé avec les talibans en février 2020, cherchent avant tout à obtenir des gages pour que l’Afghanistan ne serve pas de base opérationnelle pour des groupes tels que al-Qaida ou Daech.

Les talibans face aux sanctions

Parallèlement, ces mêmes talibans doivent s’appuyer sur les structures administratives existantes, n’ayant pas dans leurs rangs l’expertise nécessaire pour gouverner seuls le pays, et notamment relancer une économie dévastée par la guerre et très dépendante de l’aide internationale. Ils auraient entamé des négociations avec Ankara pour que la Turquie continue à gérer l’aéroport, précieuse fenêtre d’entrée pour les aides internationales. L’Organisation mondiale de la santé a déjà prévenu que la situation sanitaire risquait de s’aggraver d’ici à une semaine. La Banque mondiale a annoncé mardi avoir suspendu ses aides à l’Afghanistan, tout en explorant «  les moyens de rester engagés pour (…) continuer à soutenir le peuple afghan ». Le Fonds monétaire international a déjà gelé sa participation.

Les talibans n’ont toujours pas formé de gouvernement, disant attendre que le dernier soldat étranger ait quitté le pays. Sans lois valables sur tout le territoire, les règles diffèrent d’une région à l’autre. Signe qui ne trompe pas : le site de la présidence afghane n’a pas été modifié. Sur la page d’accueil, on y voit deux photos, celle d’Ashraf Ghani, en fuite aux Émirats arabes unis, et celle de Joe Biden. Tout un symbole.

Ces syndicalistes méprisés par le quai d’orsay

Depuis des semaines, Imamudin Hamdard, syndicaliste qui a également travaillé pour le centre culturel français de Kaboul, tente de quitter l’Afghanistan. Les autorités françaises ont finalement accédé à sa demande ainsi qu’à celle du président de l’Union nationale des travailleurs et des employés afghans (Nuawe), Maroof Qaderi. En France, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, est intervenu plusieurs fois. La Confédération syndicale internationale aussi. « Nos camarades syndicalistes afghans, qui ont pris une large place dans le combat contre les talibans, ne doivent pas être oubliés par le gouvernement français », explique le syndicat. Tout semblait réglé, y compris avec des assurances du Quai d’Orsay. Mais Hamdard et Qaderi n’ont pas pu entrer dans l’enceinte de l’aéroport alors qu’ils se trouvaient devant avec tous les papiers nécessaires. Les soldats américains ont refusé de les laisser passer sans la présence d’un membre de l’ambassade de France. Personne n’est venu à leur rencontre. Pis, via WhatsApp, sous l’identité French Ambassy Airport 2, un diplomate français s’est permis de les apostropher – « Vous vous moquez du monde ? (...) Tant pis , vous êtes en train de louper le coche » –, de les insulter –​​​​​​​ « Mais vous n’avez pas envie de partir, au fond » – et les a punis : « Bon, je vous bloque ».

 

jeudi 26 août 2021

« Impasse », l’éditorial de Maud Vergnol dans l’Humanité.


 


Pomme de discorde du moment, le mouvement « anti-passe sanitaire » soulève autant d’interrogations que de condamnations, d’empathie ou d’inquiétude, tant il agit comme un révélateur de l’abîme politique qui guette le pays. Composite dans ses motivations et ses expressions, cet ovni échappe au modèle des mobilisations traditionnelles.

Pour mieux comprendre, l’Humanité est allée rencontrer celles et ceux qui battent le pavé tous les samedis, déversant une colère cumulative contre un président qui n’a cessé de semer la division et la défiance. Le fond de l’air y est trouble, entre inquiétudes légitimes sur les inégalités créées par le passe sanitaire, mais aussi, et surtout, un complotisme acharné, une défiance irrationnelle à l’égard des vaccins, terreau fertile pour l’extrême droite, qui compte y faire son miel. Comparaisons obscènes avec le régime de Vichy ou la Shoah, pancartes antisémites abjectes, ces passions tristes s’y déploient avec d’autant moins de complexes qu’elles sont minoritaires.

Avec de tels épouvantails comme adversaires, Emmanuel Macron peut dormir tranquille en jouant la carte d’un pouvoir éclairé et raisonnable qui protégerait sa population face à des hordes d’ignorants haineux. L’histoire est pourtant tout autre. Celle d’un président dont tout le quinquennat a écrit le prologue de cette impasse démocratique, seule à même de le maintenir au pouvoir. Le pseudo-« dépassement » du clivage gauche-droite, des partis politiques et organisations syndicales, ou encore le mépris des corps intermédiaires, signature politique du macronisme, ont créé les conditions de ce confusionnisme qui renvoie les individus à eux-mêmes, nourrit la défiance à l’égard de toute institution ou parole publique. Le choix du passe sanitaire, plutôt que la vaccination obligatoire, est lui aussi symptomatique d’un libéralisme qui fait reposer une politique sanitaire sur des choix individuels, au risque de creuser les inégalités et fracturer toujours plus la société française. Face à ce piège, la colère, si elle ne se teinte pas d’espérance sociale, mènera à une impasse.

mercredi 25 août 2021

De Munich à… Kaboul, L’éditorial de L’Humanité Dimanche du 26 août au 1er septembre 2021 – par Patrick Le Hyaric.


Qui peut croire un seul instant que les talibans allaient respecter leur parole, consignée dans l’accord secret conclu avec l’impérium nord-américain ? Les Nations Unies dénoncent la traque d’anciens fonctionnaires, de militants démocrates, des droits des femmes, de l’éducation et de la culture, de la liberté d’informer ou de la paix.

Seul le ministre des Affaires étrangères de notre pays ose parler d’un « gouvernement inclusif ». Belle fable !  Ce sont les envoyés de M. Trump, puis de M. Biden, qui ont fait le choix de négocier exclusivement avec les seigneurs de guerre, au détriment de toutes les autres forces politiques, associatives et religieuses afghanes.

Ce sont eux déjà qui, après avoir déversé sur le pays un déluge de fer et de feux, ont imposé une constitution à « l’américaine » et choisi le chef de l’exécutif afghan, lequel arrosait avec les dollars américains les députés qui n’avaient pour unique rôle que de l’adouber. Ces derniers et les potentats locaux détournaient l’argent public venu de l’étranger pour construire leurs belles villas dans les pays du Golfe, tandis que la rébellion talibane se nourrissait aux mêmes gamelles auxquelles s’ajoutait « l’impôt » sur l’opium.

En niant l’histoire et la géographie, toutes les spécificités de la vie afghane, les groupes et les réseaux de solidarité locaux et régionaux ainsi que les différents groupes religieux, les pays de l’OTAN ont sciemment ignoré les démocrates, les penseurs, les travailleurs, la jeunesse urbaine en quête d’émancipation, les femmes qui encore le 16 août dernier manifestaient pour réclamer le droit d’étudier, de travailler, de voter et d’être élues.

Ce comportement munichois laissera de profondes traces. Il montre, à quel point jamais la guerre n’est la solution, ni en Afghanistan, ni en Irak, ni en Lybie, ni en Syrie. L’Otan aura semé la mort et le désespoir dans toute la région au nom de l’exportation de la démocratie et des libertés qui n’a été que le paravent du combat contre les forces communistes, socialistes, syndicalistes et progressistes dans tout le Moyen Orient, en alliance avec l’hydre islamiste.

Mais dans un contexte nouveau de celui d’il y 20 ans, la capitulation de Kaboul constituera une onde de choc servant d’appui pour la déstabilisation de plusieurs États dans la région, du Pakistan à l’Inde et toute l’Asie centrale jusque certaines contrées chinoise. Peut-être est-ce une des espérances de l’administration américaine qui de surcroit veut intensifier la nouvelle guerre froide avec Pékin. Le pouvoir chinois ne l’acceptera pas et cherche des compromis avec les talibans  pour sa protection et pour l’exploitation des immenses richesses du sous-sol, en compétition féroce avec les multinationales occidentales. Ceci ne fera en définitive que renforcer les nouveaux maîtres de Kaboul.  

Ajoutons que la nouvelle donne en Afghanistan procure des ailes à d’autres mouvements islamistes dont ceux de la région du Sahel où la France est très impliquée.

L’intérêt de tous contre le djihad islamiste devrait conduire les pays de l’Union européenne à ne pas suivre l’impérium en difficulté mais à s’efforcer de promouvoir un dialogue de type nouveau, sans concession, entre toutes les nations concernées, y compris avec la Chine et la Russie, sans lesquelles rien ne saurait changer.

Notre combat solidaire pour un nouvel internationalisme poussant loin le progrès social, démocratique, le développement humain et écologique, dans le cadre de nations souveraines, doit reprendre des forces.

Cette solidarité doit nous conduire à agir pour empêcher les expulsions de ressortissants afghans, à faire respecter les conventions de Genève sur le droit d’asile des citoyens afghans menacés. La coopération et des actions de soutien devraient être menées avec les mouvements démocratiques, de paix et de protection des femmes. La Fête de l’Humanité dans quelques semaines en sera l’un des lieux.