Ce 31 janvier signe un nouvel éclatant succès
populaire contre la retraite à 64 ans, mais, parmi le flot ininterrompu
des manifestants, c’est la levée en masse des villes moyennes qui inquiète le
plus le gouvernement. Cette France qui avait enfilé le gilet jaune sur les
ronds-points, en 2018-2019, vient gonfler, à la surprise générale, le mouvement
montant contre le projet de l’exécutif. Le 19 janvier n’était pas un feu
de paille : comme il y a deux semaines, forces syndicales et forces de police
convergent – excusez du peu – pour mesurer, chacune selon leur échelle, une affluence exceptionnelle dans les préfectures et les sous-préfectures.
Mende, Alès, Angoulême, Montargis, Blois, Périgueux,
La Roche-sur-Yon… Ce n’est pas seulement une certaine « France
profonde » qui remue,
d’ordinaire éclipsée des gros titres par le bourdonnement économique des métropoles. C’est aussi la
France des employés et des précaires, chassés des grands centres urbains
devenus inaccessibles financièrement, qui retrouve le chemin des cortèges des
organisations ouvrières. Prolétariat des villes et prolétariat des campagnes
réunis dans un même refus du « travailler plus pour travailler vieux » : cette fusion que les gilets jaunes avaient échoué à réaliser, il y
a quatre ans, le gouvernement en a fourni l’étincelle, comme il a réussi l’exploit de fédérer contre lui la totalité du mouvement syndical.
Au fond, ce n’est rien d’autre que le pire cauchemar
d’Emmanuel Macron qui est en train de se matérialiser. Il est grand temps de
retirer le projet de loi si l’Élysée et Matignon veulent éviter une explosion
sociale bien plus forte. Car la levée en masse des petites villes plonge ses
racines bien au-delà de la réforme des retraites, dans l’abandon dans lequel
sont laissées leurs populations privées de services publics, d’industrie, de
loisirs et de revenus décents depuis trop longtemps. La retraite à 64 ans
est la goutte de trop, après les sacrifices du Covid, le mépris pour les gilets
jaunes et l’inflation qui ronge la vie quotidienne. À bon entendeur…
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