Les présidents français et italien peuvent bien tenter
de donner le change en insistant de concert, comme ils l’ont fait lundi matin,
sur la force des liens qui unissent leurs deux pays, le mal est fait. L’écume
de l’Ocean-Viking n’est pas près de retomber, tant l’épisode
laissera des traces profondes. On ne parle pas ici de la polémique indigne qui
continue d’enfler, alimentée, entre autres, par les médias du groupe Bolloré,
tout comme par un ancien ministre de l’Intérieur qui juge à propos de tancer
l’accueil de 230 malheureux par un État de 67 millions d’habitants. Ni de
l’incroyable ballet diplomatique et policier exécuté pour l’accostage d’un
simple navire humanitaire d’une ONG d’assistance aux naufragés.
Non, ce qui devrait agiter chaînes de télévision et
commentateurs est le terrible aveu d’impuissance d’une Europe incapable
d’appliquer les valeurs et les droits qu’elle promeut à longueur de discours et
de traités. Le gouvernement français, dans la cacophonie qui l’a opposé à son
voisin, ne s’en sort pas avec les honneurs, comme il a pu se dire hâtivement.
C’est sous deux pressions contraires – celles de l’urgence humanitaire, d’un
côté ; de l’extrême droite,
de l’autre, hostile à toute concession – que l’exécutif a, de
mauvaise grâce et de guerre lasse, décidé d’ouvrir le
port de Toulon au bateau de SOS Méditerranée. Un geste d’où a été gommée toute
dimension de générosité humaine – les rescapés ont été parqués en « zone d’attente », sans droit
d’accès au
territoire national – pour se
limiter au devoir de sauvetage qui s’impose même au plus égoïste des gouvernements.
On ne peut certes que se féliciter qu’on n’ait pas
rejeté à la mer les exilés, à la différence de l’Italie de Giorgia Meloni. Mais
les tergiversations et le retard à leur venir en aide ôtent toute grandeur au
geste du gouvernement français. Par peur de déplaire au RN et à ses électeurs,
Emmanuel Macron rogne les principes censés guider l’action de notre pays. C’est
un jeu mortifère : aucune concession sur ce terrain ne suffira jamais à l’extrême droite, pour laquelle l’autorisation d’accostage de l’ Ocean-Viking est déjà de
trop.
PAR PEUR DE DÉPLAIRE AU RN ET À SES ÉLECTEURS, EMMANUEL MACRON ROGNE LES
PRINCIPES CENSÉS GUIDER L’ACTION DE NOTRE PAYS.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire