Au début du mois, le gouvernement, qui détient déjà
84 % des actions d’EDF, a enclenché le processus de réétatisation de
l’entreprise. Il s’agit d’indemniser les 16 % d’actionnaires minoritaires
pour un montant total de plus de 8 milliards d’euros. Pourquoi un tel
choix ? Dans un
contexte de crise énergétique et potentiellement d’approvisionnement, alors que les factures explosent et
plongent de nombreuses familles dans la précarité énergétique, l’avenir de l’entreprise
préférée des Français a de quoi inquiéter.
S’il y a des aspects conjoncturels dans cette crise,
dont la guerre en Ukraine, c’est surtout la libéralisation du secteur de
l’énergie et l’Arenh, système franco-français exigeant d’EDF de vendre à bas
coût une partie de son énergie nucléaire à ses concurrents, qui ont affaibli
considérablement l’entreprise publique historique. Alors que ses capacités
d’investissement ont été amoindries par l’État au fil des années, que les
métiers et les savoir-faire ont été amputés, que la moitié des centrales nucléaires
sont à l’arrêt en raison de tergiversations d’un État sans vision d’avenir,
quel sera le mandat confié au futur PDG d’EDF, Luc Rémont, si les deux
commissions des Affaires économiques du Parlement valident cette nomination ? La création d’un grand service public de l’énergie ou le retour du projet Hercule avec
une privatisation d’une partie des activités ?
Pour mieux comprendre ce projet de démantèlement
d’EDF, il faut revenir quelques années en arrière. En 2019, on apprenait qu’un
projet de vente à la découpe d’EDF se négociait discrètement avec la Commission
européenne. Son nom ? Hercule – l’héroïsme, la réussite des tâches les
plus impossibles… une idée de technocrate en pleine hubris. Le but ? Découper EDF, conserver le nucléaire dans le giron de l’État, et privatiser, en partie
nous disait-on, les énergies renouvelables et quelques autres activités
rentables, dont Enedis. La suite ? Mobilisation des salariés et recul du gouvernement… pour un retour à la charge en 2021 avec un nouveau projet, le « Grand EDF », que
Jean-Bernard Lévy n’aura pas le
temps de mener, fort heureusement, lâché par le président de la République.
Cette réétatisation n’est-elle donc rien d’autre qu’un
retour masqué de ce projet de démantèlement de l’électricien et de désengagement
de l’État ? Récupérer 100 % de ses actions lui permettrait d’avoir les mains libres pour décider seul, sans le pouvoir de nuisance potentiel des
actionnaires minoritaires. Pour l’instant, rien ne filtre, sauf la quasi-régie pour « sauver » de la privatisation
les barrages hydroélectriques. Mais quel avenir pour la filière nucléaire ? Qui du
privé ou d’EDF développera les énergies renouvelables de demain en répondant à une question d’aménagement du territoire ? EDF sera-t-elle scindée en filiales, dont certaines ouvertes aux capitaux privés ?
Il y a là un véritable enjeu démocratique ; un tel
projet ne peut être inséré par voie d’amendement, sans débat global au Parlement. Ce débat doit avoir lieu par un projet de loi plein et entier, mais également avec les salariés et les associations
d’usagers, en toute transparence. Au contraire d’un démantèlement, notre pays
et les usagers ont besoin d’un véritable service public de l’énergie qui
engloberait toutes les sources d’énergie, de la production à la distribution,
et permettrait de sécuriser l’accès à l’énergie et de la reconnaître enfin pour
ce qu’elle est : un bien commun essentiel à la vie de
toutes et tous, sorti des griffes du marché !
QUEL AVENIR POUR LA FILIÈRE NUCLÉAIRE ? QUI DU PRIVÉ OU D’EDF DÉVELOPPERA LES ÉNERGIES RENOUVELABLES ? EDF SERA-T-ELLE SCINDÉE EN FILIALES ?
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