C’est une de ces phrases qui font froid dans le dos.
Surtout lorsqu’on sait par qui elle est prononcée. Que le ministre russe des
Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, déclare à la télévision publique qu’il y a
un « danger réel » d’une « troisième guerre mondiale » montre bien que le
conflit en Ukraine entre dans une nouvelle phase. Certes, cette déclaration
s’adresse aux États-Unis, elle est une réponse à une petite phrase de Lloyd
Austin, le secrétaire à la Défense, qui, après sa visite à Kiev, donnait les
objectifs de son pays : « Nous voulons voir la Russie affaiblie, incapable de
mener le type d’action qu’elle a lancée sur l’Ukraine. » Si on traduit les propos de Lavrov en langage
courant, ils signifient : « Américains, vous poussez le bouchon un peu trop loin. Attention ! »
Mais cette déclaration de Lavrov constitue aussi un
coup de semonce et un tournant inquiétants dans la guerre. Les Russes tracent
une ligne rouge qui coïncide avec l’accélération des livraisons d’armes
américaines et occidentales à l’Ukraine. Chars Guepard allemands, missiles
antichars Milan et canons Caesar français, et obusiers, drones tueurs et
hélicoptères américains… autant de matériels qui vont un peu plus compliquer la
tâche de l’armée russe. Une situation qui, comme l’explique Lavrov, signifie
que « l’Otan est, en substance, engagée dans une guerre avec la Russie ». Le ministre précise que ces armes sont donc « des cibles légitimes ». De là à frapper des zones de stockage hors Ukraine,
donc de fait des territoires de l’Otan ? La menace est implicite mais réelle.
Pour engager la désescalade, l’Otan ne doit pas se
laisser entraîner dans le scénario d’une défaite militaire de la Russie, qui
semble avoir désormais la faveur de certains de ses membres. Sans en rabattre
sur le soutien à l’Ukraine agressée, la France doit rester sur sa ligne, peser
de tout son poids pour ne pas laisser se fermer les portes du dialogue, et
refuser toutes chimères d’un règlement militaire du conflit.
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