L’hôpital se meurt, abandonné par les pouvoirs successifs qui ont
désinvesti notre système de santé. Les personnels soignants sont en grève,
harassés par la crise sanitaire, mais surtout par des années de désengagement
financier de l’État. Cette même exaspération est sur les lèvres des blouses
blanches des centres hospitaliers des Antilles. Le gouvernement cherche par
tous les moyens à réduire les revendications des barrages à une poignée de
réfractaires hostiles à la vaccination et au passe sanitaire. Malgré la
« concession » du ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu – repousser cette
obligation pour les personnels de santé à décembre –, les piquets de grève
demeurent. Car la tension, qui se cristallise aujourd’hui autour de cette
question, est l’arbre qui cache la forêt.
La défiance devant les vaccins n’est pas étrangère au scandale du
chlordécone, ce pesticide interdit en métropole mais répandu dans les îles, qui
a empoisonné les humains, les terres, les eaux, la faune et la flore… Ce n’est
d’ailleurs pas un hasard si le gouvernement s’apprêterait (enfin) à lâcher, à
la fin de l’année, un décret reconnaissant le cancer de la prostate comme
maladie professionnelle, à la suite de l’usage du chlordécone. Sauf que c’est
toute la population qui a été exposée à ce poison.
En 2009, le soulèvement
contre la « profitation » avait mis à nu les maux systémiques et les
souffrances accrues de ces territoires : taux record de chômage et de pauvreté,
cherté de la vie… Les Antilles avaient alors rappelé aux autorités de l’époque
que la France n’est pas que l’Hexagone. Une décennie plus tard, l’architecture
de l’économie reste inchangée. Les îles réduites au rang de « colonies
de consommation », comme le dénonçaient déjà les grévistes de 2009,
restent des départements à part. L’absence d’égalité sociale induit, à juste
titre, le sentiment d’une République à plusieurs vitesses. Les crises en
Guadeloupe et en Martinique somment Paris de solder des comptes séculaires. Il
est temps.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire