Jusqu’où peut-on jouer avec la haine ? La candidature d’Éric Zemmour pose
la question. La provocation et l’outrance du personnage font ressurgir d’une
manière complètement décomplexée les vieux ressorts des discours de l’extrême
droite collaborationniste que même Le Pen n’avait pas réussi à réhabiliter. À
la complaisance médiatique inédite, qui permet à ce personnage d’occuper les
antennes à longueur de temps tout en dénonçant un « politiquement
correct » fantasmé, s’ajoute une complicité politique qui vise à en
faire un accélérateur de l’extrême droitisation du paysage politique.
L’objectif : présenter Emmanuel Macron comme le meilleur rempart à cette vague
brune.
Laisser Zemmour être candidat comme si de rien n’était, accepter de lui
ouvrir toutes les antennes, assumer d’extrème-droitiser le discours comme le
font les candidats LR participent de cette construction politicienne. Et cela
fait peser des risques extrêmement lourds à la société. En acceptant, voire en
légitimant, que des individus comme Éric Zemmour dégradent en toute impunité la
conscience d’un pays, on ouvre la porte au pire.
Les vidéos appelant explicitement à liquider des personnalités de gauche
comme Jean-Luc Mélenchon ne sont pas de simples provocations. Une partie de
l’extrême droite encouragée par la reprise du pire de ses idées à des heures de
grande écoute se sent autorisée à menacer physiquement ceux qui ne pensent pas
comme elle. Certains sont même prêts à passer à l’acte. CNews n’en a pas fait
ses gros titres mais l’arrestation, ces derniers jours, de militants
identitaires qui disposaient d’un véritable arsenal prouve que la France n’est
pas à l’abri d’un Christchurch. Il y a deux ans, Brenton Tarrant, qui a ouvert le
feu sur des musulmans dans cette ville de Nouvelle-Zélande, faisant
51 victimes, avait reconnu être un adepte du « grand
remplacement »… Pseudo-théorie fumeuse dont le candidat Zemmour a fait
son bréviaire.
Alors, non, la
candidature d’Éric Zemmour n’est pas une candidature comme les autres. Et il
est temps de donner un coup d’arrêt à ce sentiment d’impunité qui permet
d’inciter à la haine de l’autre en toute tranquillité. C’est en ce sens que la
résolution portée par Fabien Roussel de rendre inéligibles les personnes
condamnées pour provocation à la haine raciale corrige une dangereuse anomalie
démocratique.
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