mardi 2 novembre 2021

« Voleurs d’avenir », l’éditorial de Maurice Ulrich dans l’Humanité.



Il fallait beaucoup de bonne volonté au Parisien, l’un des deux quotidiens avec les Échos du groupe de Bernard Arnault, pour saluer l’ouverture à Glasgow de la COP26 en écrivant que tous les regards y étaient braqués sur Emmanuel Macron, animé d’une ardeur sans pareille. L’avis de Vanessa Nakate, l’une des jeunes militantes du climat en Afrique, est un peu plus nuancé, qui dénonce l’hypocrisie de la France avec l’ouverture sur le continent de quatre cents nouveaux puits de pétrole par Total-Energies. Mais quoi de commun entre l’hyper-milliardaire de l’industrie du luxe et ce même continent où des femmes et des enfants peuvent faire dix kilomètres pour ramener l’eau tirée d’un puits boueux. La même planète, si on veut, le même monde, sûrement pas. L’Afrique, souligne encore la jeune femme, produit 3 % des gaz à effet de serre dans le monde, mais en subit en retour les effets parmi les plus dévastateurs. Les vingt pays les plus riches de la planète, fracturés aussi par les inégalités, produisent à eux seuls 80 % des émissions mondiales, mais à brève échéance un milliard d’habitants des pays les plus pauvres seront frappés par les sécheresses, les inondations, les famines. Ce sont ces mêmes pays qui attendent toujours les cent milliards d’aide qui leur avaient été promis en 2015, devenus un mythe.

En Argentine, où deux cents militants et militantes du climat, sont assassinés chaque année, une autre jeune femme, Nicky Becker, le dit avec force. « On ne peut pas résoudre la crise sans parler de justice sociale et de déséquilibre Nord-Sud. » À Glasgow, où les absents auront tort, 196 pays vont tenter, disent-ils, d’avancer vers l’objectif claironné de 1,5 degré de réchauffement maximal, sans quoi « nous » allons à la catastrophe. Mais l’une des conditions de tout pas en avant, c’est que ce « nous » soit réel. C’est ce que vont rappeler pendant deux semaines les manifestants sur place et dans le monde. Souvent des jeunes par dizaines de milliers. Ces jeunes pour qui Greta Thunberg lançait à ceux qu’on nomme grands, « vous dites aimer vos enfants mais vous leur volez leur avenir ».

 

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