C’est un fait inédit dans l’histoire de votre journal, qui a pourtant tout
vécu des intimidations, censures et pressions de toute sorte. Pour la première
fois, un pouvoir étranger met en branle sa puissance d’État dans une procédure
judiciaire contre l’Humanité et l’une de ses journalistes,
Rosa Moussaoui. Notre crime : avoir mis en lumière les agissements de la
monarchie marocaine dans l’affaire dite « Pegasus », du nom du logiciel d’espionnage
israélien auquel plusieurs pays sont suspectés d’avoir eu recours, parmi
lesquels le Maroc, en violation des libertés des journalistes et des opposants
à sa politique.
Pour le royaume, raconter, enquête à l’appui, les soupçons de
cyberespionnage qui pèsent sur lui – et dont Rosa Moussaoui a pu être une
des cibles personnelles –, mais aussi les machinations ourdies contre des
journalistes pour les faire tomber, ou encore les persécutions infligées au
peuple colonisé du Sahara occidental, ne relève pas du journalisme mais de
la « diffamation ». Quand ce ne sont pas ses avocats qui le disent,
ce sont ses organes de « presse » non officiels mais clairement liés au régime,
lesquels n’hésitent pas de leur côté à noyer l’information qui dérange sous un
flot d’injures et de diffamations authentiques. Faut-il que ce que met à nu la
plume de Rosa fasse trembler le Maroc pour que notre courageuse reporter en
fasse aujourd’hui les frais, sa photo jetée en pâture aux réseaux pro-Mohammed
VI accompagnée de commentaires infamants.
Avec le procès qui
démarre mardi, les moyens changent, mais l’objectif au fond est le même. L’État
du Maroc, qui se présente comiquement comme un « particulier » injustement
sali, sait bien que ses chances de berner les juges sont réduites. L’essentiel
est ailleurs : faire peur et, surtout, faire taire, pour que notre ami le roi
n’ait jamais à s’expliquer sur l’affaire Pegasus et toutes les autres. Il est
mal tombé. Ce lundi soir, à la veille du procès intenté par le Maroc, la bourse
du travail de Paris va résonner de toutes les voix de la solidarité avec l’Humanité et
pour une presse libre, et elles sont nombreuses : amis, lecteurs, confrères,
élus, syndicalistes. Pour continuer de chercher la vérité. Et de la dire !
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