Nous ne regretterons pas la traditionnelle photo où le président de la République française posait tout sourire aux côtés des chefs d’État africains et autres satrapes, piliers de la Françafrique. Mais il est stupéfiant qu’Emmanuel Macron puisse se passer de ses homologues du 28e sommet France-Afrique de Montpellier sans que cela n’offusque personne. Ses pairs – quoique certains encombrants mais très utiles aux intérêts de l’Hexagone – se retrouvent ainsi mis à l’index, cantonnés au statut de subalternes. Ce choix illustre la toute-puissance que croit détenir Paris sur les capitales africaines. L’Élysée l’assume au nom d’un prétendu dialogue direct avec la société civile africaine et le monde de l’entrepreneuriat, seuls invités de la rencontre.
L’opération marketing de la Macronie, qui poursuit là son entreprise de
privatisation de la diplomatie, est un écran de fumée. Les relations avec
l’Algérie et le Mali sont au plus mal ; le sentiment anti-Français ne fait que
croître à l’aune des déclarations tonitruantes d’Emmanuel Macron. Le président
ne peut dédouaner la France de ses responsabilités dans l’échec des opérations
militaires au Sahel. L’emprise grandissante des islamistes dans la région est
l’une des conséquences tragiques de l’intervention en Libye. Si Paris veut
changer radicalement son image en Afrique, et son rapport aux nations de ce
continent, il lui faudra produire des gestes. De vrais gestes qui n’ont rien à
voir avec une quelconque repentance, et encore moins des stratégies de
communication.
La France doit
reconnaître ses erreurs, les crimes barbares dont elle s’est rendue coupable ou
complice. Le rapport Duclert sur le génocide au Rwanda ou encore la non-levée
du secret-défense sur l’assassinat de Thomas Sankara témoignent du travail
qu’il reste encore à accomplir. On ne peut se flatter de débattre à Montpellier
avec des jeunes Africains triés sur le volet et, dans le même temps, barrer la
route à des étudiants désireux de venir en France en leur imposant des droits
d’inscription faramineux. Hérités d’un autre temps, les réseaux de la
Françafrique perdurent. Or, il n’y aura de « réinvention » des relations
franco-africaines tant que subsistera cette architecture néocoloniale.
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