jeudi 5 août 2021

« Trahison », l’éditorial de Pierre-Henri Lab.



Une fois n’est pas coutume, il fallait regarder le 20 heures de France 2, mardi 3 août, pour y voir la violence de classe qu’exercent ce gouvernement et le patronat sur les travailleurs. ­Visiblement désemparée, Frédérique, 49 ans, habitante de Revin, dans les Ardennes, montrait à la caméra son curriculum vitae et une lettre de ­candidature à l’écriture soignée. Comme des centaines d’autres privés d’emploi de cette petite ville de 6 000 habitants qui compte 26 % de chômeurs, elle espérait décrocher un des 270 emplois que devait créer la relocalisation de la fabrication des célèbres cycles Mercier. Mais, voilà, l’État, qui promettait d’investir 5,2 millions ­d’euros, fait finalement marche arrière et le projet menace d’être abandonné. Pour Frédérique, l’espoir a fait place au « dépit ». Les élus locaux, du PCF à LR, dénoncent « une trahison ».

Pour se justifier, le gouvernement met en cause la fiabilité du repreneur, l’accusant de blanchiment et de fraude. Le 15 mars dernier, la ministre en charge de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, Jacqueline Gourault, s’était pourtant précipitée sur les lieux de la future usine afin de s’afficher aux côtés de l’homme d’affaires pour ­annoncer la bonne nouvelle. Alors que le pays a découvert sa dépendance aux importations, à la faveur de la crise sanitaire, et que la pratique du vélo gagne du terrain sur fond de transition écologique, il s’agissait de donner l’image d’un gouvernement mobilisé en faveur des relocalisations.

Las, la « politique industrielle » de l’exécutif apparaît pour ce qu’elle est : au service d’actionnaires et de leurs profits. D’un côté, on déverse sur les grands groupes à fonds perdu des milliards d’euros d’argent public dont une partie sert à payer leurs ­colossaux dividendes. De l’autre, on laisse les mêmes actionnaires maîtres du devenir de l’outil ­industriel et, par là même, du sort de millions de salariés. Décidément, l’avenir du pays est une question trop importante pour être laissée aux mains du ­patronat. 

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