vendredi 6 août 2021

« La guerre, encore », l’éditorial de Cathy Dos Santos dans l’Humanité.



On allait voir ce que l’on allait voir. Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, le président George W. Bush promettait une guerre totale contre le terrorisme et le commanditaire de ces attaques, Oussama Ben Laden, qui fut durant des années une solide cheville ouvrière de la CIA au Pakistan. Washington lançait alors l’opération « Liberté immuable » en Afghanistan, emmuré par les talibans depuis 1996. Vingt ans plus tard, après des dizaines de milliers de morts innocents, le bilan est atterrant. Les forces militaires états-uniennes et leurs alliés de l’Otan, qui auront définitivement quitté ce pays au 31 août, laissent derrière eux un champ de ruines fumantes et les fondamentalistes aux portes du pouvoir.

Les États-Unis ont « atteint leurs objectifs » dans leur lutte contre le terrorisme, a récemment déclaré le président Joe Biden. Ces propos hypocrites et cyniques peinent à dissimuler un échec inavouable. Les près de 1 860 milliards d’euros dépensés dans leur entreprise de ratissage n’ont pas anéanti le « sanctuaire djihadiste ». Les talibans restent invaincus et se sont même renforcés. Les accords de Doha conclus en 2020 avec l’administration de Donald Trump leur ont offert une incroyable légitimité en les propulsant au rang d’interlocuteurs privilégiés. Les autorités afghanes, elles, ne contrôlent plus que des miettes de territoire face à l’hydre de l’islamisme le plus rétrograde.

Pour la première puissance mondiale, la débâcle est complète. Mais, encore une fois, ce sont les Afghans qui vont payer le prix fort de son bellicisme. Son retrait militaire ne marque pas la fin des affrontements meurtriers, mais le début d’un nouvel avenir tout aussi dramatique. Alors que le pays est dévasté, que plus de 60 % de la population survit sous le seuil de pauvreté, le pire se dessine déjà. La revanche des rigoristes a sonné avec la multiplication d’assassinats ciblés. Là où ils règnent en maîtres, l’obscurantisme redevient la loi. Les femmes en sont les premières victimes, condamnées à n’être plus que des ombres derrière les hommes de leur famille, ensevelies dans cette tombe de tissu qu’est la burqa. Vingt ans de guerre pour rien. Le goût de sang et de cendres est insupportable.

 

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