Effets secondaires ?
Dangerosité ? Efficacité contre les variants ? De nombreuses interrogations
nourrissent l’hésitation vaccinale. Pour démêler le vrai du faux, dix points
basés sur les dernières études scientifiques.
1/ On ne sait pas ce que contiennent les vaccins
Faux La composition des sérums est parfaitement connue. Le principe actif
des vaccins développés par Pfizer/BioNTech et Moderna est l’ARN messager : du
fait de sa relative nouveauté, cette technologie dite des « vaccins à acides
nucléiques » suscite des questions et des craintes. De quoi parle-t-on
exactement ? Il faut savoir que l’ARN est une molécule présente naturellement
dans les cellules des êtres vivants qui « sert à fabriquer les
protéines nécessaires au fonctionnement de l’organisme », explique
l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Comme le
rappelle Bruno Pitard, directeur de recherche à l’Inserm et spécialiste de la
vaccination ARN, tous les vaccins reposent sur le même principe : ils
consistent « à injecter dans l’organisme de faibles doses d’un agent
pathogène (virus ou bactérie) ou des fragments d’agent pathogène pour exposer
le système immunitaire et le préparer à contrer les attaques futures ».
Dans le cas des vaccins Pfizer et BioNTech, on injecte des molécules d’ARN
messager – une copie de synthèse d’un brin de code génétique du virus et
non du virus lui-même, contrairement aux vaccins classiques – qui vont
servir à la fabrication de la protéine Spike, laquelle va déclencher la
production d’anticorps. Cet ARNm est enrobé d’une capsule lipidique pour le
préserver de toute destruction, mais aussi pour faciliter la pénétration dans
le cytoplasme de la cellule.
Les vaccins des laboratoires AstraZeneca et Johnson & Johnson reposent,
eux, sur le principe de l’adénovirus. Il s’agit d’utiliser un virus affaibli
pour transporter une petite partie de l’ADN du coronavirus dans notre corps et
lui apprendre à se défendre.
2/ Les vaccins à ARN messager modifient notre patrimoine génétique
Faux « L’ARN messager n’est pas capable de s’insérer dans le noyau
des cellules et n’entre pas en contact avec l’ADN (les molécules porteuses du
patrimoine génétique – NDLR). En aucun cas, il ne peut modifier notre
génome », insiste Dominique Deplanque, professeur de pharmacologie
médicale au centre d’investigation clinique du CHU de Lille. En outre, « la
présence de cet ARN messager dans l’organisme est très fugace, il disparaît
rapidement après son injection ». Il produit juste ce qu’il faut pour
entraîner le système immunitaire à réagir en cas d’infection « naturelle » par
le virus avant d’être éliminé. Cette ambiguïté s’explique par le fait qu’il
existe « des micro-ARN qui peuvent interagir avec l’ADN, mais il ne
s’agit pas des mêmes molécules, précise le Pr Deplanque. Comme dans
bon nombre de théories diverses et variées, il y a un petit fond de vérité,
mais celle-ci est surinterprétée pour introduire le doute ».
3/ Les vaccins ont été mis au point trop rapidement
Faux En temps normal, il faut compter entre huit et quinze ans pour le
développement d’un vaccin. Ceux contre le Covid ont été élaborés en dix-huit
mois ! Ceci s’explique par plusieurs raisons : tout d’abord, même si elle était
relativement confidentielle, la technologie de l’ARN messager ne date pas
d’hier. Des chercheurs travaillent sur le sujet depuis plusieurs
décennies. « Les épidémies précédentes de Sars-CoV-1, en 2002-2003, et
de Mers-CoV, en 2012, avaient permis de développer des candidats-vaccins »,
indique le Pr Deplanque. « Plusieurs essais sur l’homme ont été
menés, notamment pour des vaccins contre des maladies infectieuses (le VIH, le
virus Zika). Pour le candidat-vaccin Ebola, on était ainsi allé jusqu’en phase
1 », renchérit Morgane Bomsel, immunologiste, directrice de recherche au
CNRS et cheffe du service « entrée muqueuse du VIH et immunité muqueuse » à
l’institut Cochin, à Paris, qui travaille depuis mars 2020 sur le Covid-19 avec
son équipe. Ces antécédents expliquent pourquoi la première étude clinique sur
le Covid a pu avoir lieu dès mars 2020. « On disposait, en outre, en
2020 d’une maturité technologique pour comprendre rapidement ce virus »,
poursuit Dominique Deplanque. Enfin, la vitesse de propagation de l’épidémie et
le nombre de malades ont permis d’aller plus vite dans les phases d’essai
clinique : « On a eu beaucoup de volontaires pour y participer »,
précise le professeur de pharmacologie médicale. « La vitesse de
circulation du virus dans la population a permis d’obtenir plus rapidement des
résultats d’efficacité », corrobore Morgane Bomsel. Quant aux délais
administratifs, ils ont été raccourcis, « le processus de validation
des données cliniques a été fait en temps réel, ce qui a permis de gagner du
temps ». Par ailleurs, jamais les fonds attribués à ce type de recherche
n’avaient été aussi élevés, aussi bien l’argent investi par les laboratoires
que par les autorités publiques.
4/ Le vaccin est toujours en phase expérimentale
Vrai et faux Ce qui est faux, c’est dire que les vaccins contre le Covid
sont toujours dans une phase expérimentale. En dépit de leur développement et
de leur production en un temps record, ils sont tous passés par les trois phases
obligatoires. Ils ont obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) dite
« conditionnelle », un point à l’origine de la désinformation. Ce type
d’autorisation existe depuis longtemps. « Une AMM conditionnelle,
renouvelable, permet l’autorisation de médicaments qui répondent à un besoin
médical non satisfait avant que les données à long terme sur l’efficacité et la
sécurité ne soient disponibles », mentionne l’ANSM.
Ce qui est vrai, c’est que les laboratoires se sont engagés à poursuivre
des essais cliniques complémentaires de phase 3 (jusqu’au 27 octobre
2022 pour Moderna et 31 janvier 2023 pour Pfizer) pour savoir quelle sera
exactement la nature de la réponse immunitaire apportée par le vaccin. Une
procédure habituelle dans la conception de médicaments pour permettre notamment
d’estimer d’éventuelles évolutions du rapport bénéfice-risque. Selon l’ANSM
(Agence nationale de sécurité du médicament), ces analyses permettront par
exemple d’obtenir des précisions sur « le maintien ou la baisse de la réponse
immunitaire dans le temps, l’évolution de l’efficacité vaccinale plusieurs mois
après la vaccination, la nécessité d’un rappel, l’efficacité sur des variants,
la fréquence de survenue des effets indésirables ».
5/ On va devoir se revacciner tous les six mois
On ne sait pas « Il est un peu trop tôt pour dire si une troisième
dose sera utile ou pas, estime Morgane Bomsel. Tout dépendra
de la persistance de la réponse immunitaire, et ça, on le découvre au fur et à
mesure. » « Mais d’après les immunologistes, continue Dominique
Deplanque, un certain nombre de signaux semblent montrer que les
vaccins à ARN induisent une réponse immunitaire à long terme. » En
revanche, une troisième dose est d’ores et déjà actée pour les populations dont
le système immunitaire est fragilisé par certaines pathologies (patients
greffés, insuffisants rénaux). Des essais sont également menés sur des
traitements complémentaires pour renforcer l’immunité, notamment un vaccin par
voie nasale en spray. « En complément du vaccin injecté, cela
permettrait d’induire une immunité locale qui ferait barrière au virus »,
note le Pr Deplanque. Pour améliorer la réponse immunitaire, la question
des combinaisons (ce qu’on appelle le vaccin hétérologue) se pose également :
deux études récentes, publiées dans la revue Nature, accréditent
que combiner AstraZeneca et un vaccin à ARN messager (Pfizer ou Moderna)
confère « des titres d’anticorps deux fois plus élevés » qu’avec
deux doses du même vaccin. Surtout, cela reste efficace et plus fort face aux
différents variants. Une autre étude, menée en Corée du Sud, a obtenu les mêmes
résultats.
6/ Il n’y a jamais eu autant d’effets indésirables
Faux Comme pour toute prise de médicament, la vaccination peut entraîner
des effets indésirables. « Il n’y a rien d’étonnant. Le vaccin stimule
le système immunitaire. C’est normal qu’il réagisse. Certaines personnes
ressentiront des effets plus ou moins importants, tout dépend des individus »,
ajoute Morgane Bomsel, directrice de recherche au CNRS. Fièvre, maux de tête,
fatigue, douleurs ou réactions cutanées au point d’injection… La plupart des
réactions ne sont ni graves ni durables. Il s’agit, la plupart du temps, de
symptômes grippaux bénins qui passent au bout d’une journée. Des réactions
allergiques, des effets sur la pression artérielle ou des troubles du rythme
cardiaque sont également relativement fréquents.
Quant aux réactions les plus graves, elles sont « excessivement
rares sur tous les vaccins en général et ne concernent que quelques personnes
sur des millions de vaccinés (pour rappel, plus de la moitié des Français sont
désormais complètement vaccinés contre le Covid-19 – NDLR) », rappelle
Morgane Bomsel. Ce que confirme la dernière synthèse de l’Agence nationale de
sécurité du médicament (ANSM) sur la surveillance des effets indésirables des
vaccins contre le Covid : hormis les cas de thrombose atypique liés au vaccin
AstraZeneca (56 cas enregistrés, dont 13 décès, sur les 7 411 000
injections du vaccin), les réactions les plus graves concernent des problèmes
d’inflammation cardiaque (myocardite et péricardite) apparus aussi bien chez
des patients vaccinés par un vaccin à ARNm qu’avec l’AstraZeneca. Et dans
l’immense majorité, l’évolution de l’état de santé des patients est « favorable ». « Le
tableau est bénin, transitoire et disparaît rapidement sans trace sur le muscle
cardiaque », rassure le Pr Deplanque. Concernant le vaccin Janssen,
l’Agence européenne du médicament (EMA) « considère qu’il existe un lien
possible (…) avec des cas de syndrome de Guillain-Barré ». « En
France, 4 cas ont été déclarés depuis le début du suivi, dont 3 d’évolution
favorable. Mais ils ne remettent pas en cause le rapport bénéfice/risque du
vaccin », écrit l’agence sanitaire, qui affirme que « la majorité
des effets indésirables sont attendus et non graves ». « Quand on
met tout ça dans la balance, cela reste très en faveur du vaccin », analyse
Morgane Bomsel.
7/ On n’a pas assez de recul sur les effets secondaires à long terme
Faux Le risque zéro n’existe pas. Cependant, dans l’histoire, aucun vaccin
n’a produit d’effets secondaires sérieux détectés par les autorités de
pharmacovigilance au-delà de deux à trois mois après l’injection. À ce jour,
les risques les plus graves, extrêmement rares, sont de court terme. Les cas de
thrombose atypique ont ainsi été observés de quatre à vingt-huit jours après
une dose d’AstraZeneca. « Cette nouvelle technologie n’a, jusqu’à
présent, pas mis en évidence d’effets indésirables graves à long terme. Ils
sont peu probables au regard des remontées sur les autres vaccins », assure
Morgane Bomsel. Même si la scientifique admet qu’on « n’a pas encore
tout le recul nécessaire, les craintes s’estompent au regard des milliards de
personnes vaccinées ». Plus catégorique, Dominique Deplanque répond par une
interrogation : « J’entends bien la crainte de la population sur les
effets indésirables à long terme, mais de quoi parle-t-on ? De quelques
semaines, six mois, un an, cinq ans, dix ans ? Comment rattacher un événement
médical des années après une injection ? »
8/ Le vaccin a tué des milliers de gens
Faux Des publications relayées sur les réseaux sociaux affirment que la
vaccination contre le Covid-19 a entraîné la mort de plus de 15 000 personnes
en Europe. Certains sites en évoquent plus de 18 000. Mais l’affirmation est
erronée. Il s’agit des effets indésirables « susceptibles » d’être liés à
l’utilisation des médicaments répertoriés dans les bases de données de
pharmacovigilance au niveau européen. Ils ne doivent pas être interprétés comme
des liens avérés entre l’administration du vaccin et un décès survenu après
coup. L’Agence européenne du médicament a insisté sur le fait que ces
chiffres « ne signifient pas nécessairement que les événements rapportés
ont été causés par le vaccin ». Pour le professeur Deplanque, « les
rapports de cas spontanés d’effets secondaires sont rarement suffisants pour
prouver qu’un certain effet suspecté a effectivement été causé par un
médicament spécifique. Un patient vacciné peut faire un AVC. S’il en décède, ce
n’est pas lié au vaccin ».
9/ Les vaccins sont inefficaces face aux variants
Faux « Aucun vaccin ne protège à 100 % », souligne la
Haute Autorité de santé (HAS). Comme le souligne l’épidémiologiste Antoine
Flahaut, il existe « des échappements vaccinaux et des personnes
vaccinées qui contractent le virus et qui peuvent même faire des complications
graves et en mourir ». Mais les vaccins, notamment ceux de Pfizer et
Moderna, ont fourni des données solides prouvant leur efficacité à 95 %.
Concrètement, cela signifie qu’une personne vaccinée a 95 % moins de
risque de contracter le Covid, notamment une forme symptomatique qui
potentiellement peut l’amener à l’hôpital. Selon une étude publiée en mai 2021
dans The Lancet, le vaccin de Pfizer serait même efficace à
95,3 % pour l’infection au Sars-Cov-2, à 97,2 % pour éviter les
hospitalisations et à 96,7 % pour éviter les décès chez les vaccinés ayant
reçu leur seconde dose depuis au moins sept jours. « Les vaccins disponibles
gardent une efficacité sur tous les variants », conclut l’Inserm.
10/ Être vacciné n’empêche ni d’être malade ni de transmettre le virus
Vrai « Quand
vous êtes vacciné, vous ne risquez pas de continuer à contaminer les autres »,
a affirmé Jean-Michel Blanquer le 28 juillet. Quinze jours plus tôt, Jean
Castex avait lui aussi déclaré que les personnes vaccinées n’avaient « plus
de chance d’attraper la maladie ». Des affirmations erronées. Car la
contamination reste possible. Selon une note de la Drees, 6 % des nouveaux
cas enregistrés du 28 juin au 4 juillet en France concernaient des
personnes complètement vaccinées qui peuvent contaminer d’autres personnes. Par
ailleurs, la transmission reste aussi possible et, d’après une toute récente
étude américaine dont le Dr Rochelle Walensky, directrice des centres de
prévention et de contrôle des maladies (Centers for Disease Control and
Prevention), a révélé les premiers résultats au New York Times,
même complètement vaccinées, symptomatiques ou pas, les personnes contaminées
par le variant Delta seraient porteuses d’une charge virale importante dans le
nez et dans la gorge, donc tout aussi contaminantes que des personnes non
vaccinées, ce qui n’était pas le cas avec les formes antérieures du virus.
Rappelons cependant qu’il reste avéré que le vaccin protège des formes graves.
Une nouvelle étude nationale réalisée entre le 31 mai et le
11 juillet dans les services Covid-19 et ceux de réanimation français
montre que 85 % des hospitalisés ne sont pas vacciné
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