Cyprien Boganda. Lola Scandella. Julia Hamlaoui
Préparée de longue date,
l’allocution le 12 juillet à 20 heures d’Emmanuel Macron devait
initialement fixer « le cap » des réformes de la fin du quinquennat. Mais le
chef de l’État devrait mettre l’accent sur la nouvelle phase de l’épidémie.
Depuis plusieurs semaines, l’Élysée s’emploie à préparer le terrain et
distille au compte-gouttes dans les médias des informations sur
l’intervention « avant le 14 juillet » du président de la
République. Finalement, celle-ci prendra la forme d’une nouvelle allocution
depuis l’Élysée, diffusée le lundi 12 juillet à 20 heures. Voilà pour la
forme. Quant au fond, le suspense plane toujours. Initialement, le chef de
l’État, qui a entamé en juin un « tour de France des territoires », devait,
pour tirer au mieux parti de la sortie de crise, y présenter les réformes de la
fin de son quinquennat, voire statuer sur celle des retraites. « Le
pays étant à un tournant, le président de la République s’exprimera (…) dans le
courant du mois de juillet (…) sur le cap qui va nous amener dans les dix
prochains mois jusqu’à l’élection présidentielle », indiquait fin juin le
porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. Un « cap » encore
espéré par une partie de la majorité. Mais ces derniers jours, le Covid et son
variant Delta ont bouleversé les prévisions de l’exécutif et c’est après un
conseil de défense sanitaire que le chef de l’État doit s’exprimer.
Un nouveau serrage de vis sanitaire ?
Emmanuel Macron devra ainsi d’abord trancher, ce lundi soir, la question de
la vaccination obligatoire des soignants. Dans son dernier avis, rendu public
le 9 juillet, le conseil scientifique a soutenu l’idée d’une obligation
vaccinale pour ces professionnels, appelant même à l’étendre « aux
aidants, aux personnels des services à la personne et à l’ensemble
des professionnels (non sanitaires) exposés et exposant à un risque pour
autrui ». L’hôte de l’Élysée pourrait suivre cette suggestion. Reste à
savoir selon quel calendrier et avec quelles sanctions pour les récalcitrants,
alors que le gouvernement prépare un projet de loi sur le sujet. Le président
pourrait également annoncer des mesures de ciblage des personnes de plus de
60 ans à risque et des obèses, présentant des taux de vaccination trop
faibles selon le conseil scientifique. Le chef de l’État pourrait enfin donner
des détails sur un éventuel élargissement du passe sanitaire. Pour l’instant
requis lors d’événements de plus de 1 000 personnes, cette jauge pourrait être
abaissée et le passe devenir obligatoire dans certains lieux, comme les bars et
les restaurants. Des lieux qu’il devrait être possible de fréquenter sans
contraintes horaires ou de déplacement : un retour du couvre-feu n’est a priori
pas à l’ordre du jour.
Ces nouvelles mesures ont été imposées par la progression exponentielle du
variant Delta, considéré comme majoritaire sur le territoire depuis ces
dernières heures, alors qu’il ne représentait que 10 % des nouveaux cas
fin juin. Cette propagation a fait repartir à la hausse le nombre d’infections
quotidiennes. Santé publique France en a compté 4 580 vendredi
9 juillet et 4 700 samedi, + 68 % par rapport à la semaine
précédente. « Nous sommes au départ de quelque chose qui ressemble à
une vague épidémique », un « ennemi nouveau parce que beaucoup
plus contagieux », a estimé Olivier Véran, dimanche, sur Radio J. Or,
seuls 40 % des Français présentent à ce jour un schéma vaccinal complet,
quand le conseil scientifique estime qu’il faudrait « 90 %
à 95 % de personnes vaccinées ou infectées » pour enfin « contrôler
l’épidémie ».
Incertitude sur la réforme des retraites
Emmanuel Macron profitera-t-il de son allocution pour également fixer le
cap économique de la fin du quinquennat ? Une seule certitude, plusieurs
réformes restent encore dans les cartons pour les mois à venir. La plus
consensuelle concernerait un projet de « garantie jeunes universelle », qui
prévoit le versement de 500 euros par mois assorti d’un accompagnement
personnalisé vers l’emploi pour les moins de 25 ans. Mais la réforme la
plus risquée politiquement serait bien entendu celle des retraites, relancée
par des fuites dans la presse il y a quelques semaines. Au sein de la Macronie,
certains plaident pour un allongement du temps de travail soit par une
accélération de la réforme Touraine de 2014 (hausse progressive de la durée de
cotisation pour toucher une pension à taux plein), soit par un relèvement
brutal de l’âge de départ légal. Celui-ci serait alors porté à 64 ans,
contre 62 aujourd’hui, pour un gain financier espéré de 14 milliards
d’euros dès 2026.
Mais, dans l’entourage
d’Emmanuel Macron, beaucoup pensent qu’un tel tour de vis destiné à donner des
gages à l’électorat de droite présenterait un coût politique trop important.
Les syndicats y sont toujours fermement opposés, de même que l’opinion
publique. Selon un récent sondage Elabe pour les Échos et
Radio Classique, 71 % des Français rejettent un recul de l’âge de départ,
dont 78 % d’actifs. Sans surprise, seuls les anciens électeurs de François
Fillon y sont favorables, à 62 %.
Une obligation… pour tous ?
Les Académies de médecine et de pharmacie
ont plaidé, vendredi, pour une vaccination obligatoire de toutes les personnes
de plus de 12 ans. C’est « la seule option réaliste (…) pour parvenir
à l’immunité collective », estiment-elles, alors que le principe du
volontariat « révèle aujourd’hui ses limites ». Pour les
académiciens, cette obligation vaccinale ne serait « pas seulement un
geste civique », mais « un impératif éthique ».
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