C’est ce matin, à 9 heures, qu’a pris fin le combat syndical le plus
long mené dans l’hôtellerie. Après vingt-deux mois de lutte, dont huit mois de
grève, les femmes de chambre de l’hôtel Ibis Batignolles, représentées par leur
syndicat, la CGT-HPE, ont signé un accord gagnant avec leur employeur, STN, le
sous-traitant de cet hôtel, propriété du groupe Accor. Il y a quelques
semaines, nous faisions témoigner l’une d’entre elles dans l’Humanité
Dimanche : « On est des battantes et on se tient debout depuis le
17 juillet 2019 ! Accor pariait sur notre fatigue, mais on va s’accrocher
à leurs cravates jusqu’au bout. » Et c’est ce qu’elles ont fait.
Cette détermination, elles l’ont puisée dans leur colère de se sentir à ce
point pressurées, humiliées et dépréciées. Pour nombre de ces femmes, le
travail signifie non seulement manger, mais également renouvellement du titre
de séjour. Et les patrons successifs usent et abusent de ce moyen de pression
pour toujours tirer un peu plus vers le bas les conditions de travail. Comme
une caricature de la sous-traitance, le sort fait aux femmes de chambre pointe
toutes les dérives de ce système où le donneur d’ordres peut s’exonérer de toute
responsabilité. Un système dans lequel ces femmes sont littéralement
sous-traitées, mal rémunérées, voire non payées, et réduites au statut de bras
manipulant serpillière ou aspirateur.
« Le fait principal, c’est l’humiliation » , écrivait
la philosophe Simone Weil à propos des conditions de travail de la classe
ouvrière en montrant combien les patrons voulaient que les travailleurs
laissent leur « âme dans la case où on met le carton de pointage ». Près
de cent ans plus tard, un jour de juillet 2019, les femmes de chambre de
l’Ibis Batignolles ont décidé de ne pas laisser leur âme dans la case et
de relever la tête. Elles ne l’ont jamais rebaissée. Comme elles le
disent : « La cause des femmes de chambre, c’est la cause de toutes les
femmes. Celle du droit à un travail et à un salaire décents. »
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