Une travailleuse sociale
a été tuée dans l’exercice de ses fonctions le 12 mai. Elle n’a pas eu le
droit à un hommage national. Preuve de l’absence totale de considération pour
cette profession essentielle. Témoignages.
Elle devait rendre visite à un ancien agriculteur de 83 ans, dans le cadre d’un accompagnement professionnel personnalisé. L’homme tire sur elle, la tue et se donne la mort. C’était le 12 mai. Audrey Adam, 36 ans, conseillère en économie sociale et familiale du conseil départemental de l’Aube, meurt assassinée dans l’exercice de ses fonctions. Il n’y a eu ni hommage officiel, ni gros titres dans les journaux. Pas une minute de silence, si ce n’est celle rendue le 17 mai par les travailleurs sociaux, choqués par l’absence de réactions des pouvoirs publics. Cette actualité dramatique n’est pas sans écho à d’autres. La liste des travailleurs sociaux tués ces dernières années est longue. En 2015, à Nantes, Jacques Gasztowtt, éducateur spécialisé, mourait lui aussi en exerçant son métier. Tout comme l’éducatrice spécialisée Marina Fuseau, en 2017, à Poitiers, ou encore Cyril Pierreval, chef de service d’un centre d’accueil à Pau, en février dernier.
Une assourdissante indifférence
Pour Benoît Teste, secrétaire général de la FSU, cette assourdissante
indifférence n’est « qu’une nouvelle démonstration du peu de considération
et d’intérêt dévolu à ce champ professionnel ». Alexandre Lebarbey, de la
fédération santé et travail social à la CGT, rappelle le dur quotidien des
travailleurs sociaux, « rythmé par la violence face à un public souvent
difficile, en crise ». Il le constate chaque jour : les accidents du
travail, les difficultés psycho-sociales au travail, les difficultés de
recrutement et les demandes fréquentes d’affectation ou de secteur touchent
davantage les travailleurs sociaux que les autres professions. Salaire
dérisoire (un éducateur commence sa carrière avec 1 400 euros net),
charges de travail qui explosent face à l’aggravation des inégalités et de la
paupérisation des populations fragiles…
Dans ces conditions
infernales, les travailleurs sociaux sont à bout de souffle et réclament plus
de moyens. Humains, financiers et de formation continue. D’autant que, premiers
de corvée, ils doivent « panser les plaies d’une société malade de la
dilution des liens sociaux et de la destruction des cadres collectifs et des
dispositifs permettant pourtant d’amortir la misère sociale », soulève le
syndicat Solidaires. Eux, les invisibles, comme ils se nomment, accomplissent
au quotidien des missions d’intérêt général « pour que la société
n’explose pas », soulève Cécile Boullais, assistante sociale pour l’aide
sociale à l’enfance. Et parfois la peur au ventre.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire