En un seul magnifique roman, il s’était imposé comme
une voix incontournable de la littérature française. L’attachant auteur d’À la
ligne, feuillets d’usine, s’est éteint à 42 ans.
Sa stature longiligne lui faisait tutoyer
les étoiles. Deux mètres, une barbe hirsute, des loupes en guise de lunettes,
parfois une pipe au bec et un sourire chaleureux, constant et communicatif
surplombaient jeans et marinière, costume préféré de ce Breton d’adoption.
L’écrivain Joseph Ponthus est mort à 42 ans, des suites d’un cancer. On le
savait malade car, depuis son lit d’hôpital, il documentait avec humour et
tendresse son combat sur les réseaux sociaux : « Puissent tumeurs et
métastases crever le plus tôt possible et moi bien plus tard. » Ses
béquilles poétiques (Georges Perros, Xavier Grall, Marc-Aurèle…), musicales
(Barbara, Belle and Sebastian, Nina Simone ou les Wampas…), littéraires (Dumas,
Leroy et les autres…), sa passion pour les cartes postales, son chien Pok Pok,
mis en scène dans de délicieux haïkus canins et son épouse Krystel – à laquelle
il avait dédié son splendide roman À la Ligne, feuillets d’usine – n’auront
hélas pas suffi.
Écrite à la première personne, cette œuvre
cultive le lyrisme d’un long poème en prose, décrit par l’auteur comme « un
chant d’amour à la classe ouvrière ». Il y raconte son parcours
d’ancien éducateur de banlieue parisienne exilé dans la région lorientaise par
amour. Diplômé de lettres classiques, il découvre le travail à la chaîne pour
échapper au chômage. « Tu as beau avoir lu Marx, mais, la première fois
que tu rentres dans la machine, tu te prends le Capital dans
la gueule », nous expliquait-il avec son sens aiguisé de la
métaphore. Joseph Ponthus se retrouve donc intérimaire dans une
conserverie de poisson, puis dans un abattoir.
Un écrivain généreux
La précarisation de l’emploi, la souffrance au
travail, les petits chefs, les odeurs imprégnées dans la peau, mais aussi la
solidarité, la camaraderie et l’amour irradient ce livre, récompensé par le
grand prix RTL-Lire et le prix Eugène-Dabit du roman populiste. De ses mots
était né, en décembre 2020, un album, À la ligne, chansons
d’usine, mis en musique par Michel Cloup, Julien Rufié et Pascal
Bouaziz. À la ligne restera donc l’unique roman d’un
écrivain attachant et généreux qui avait encore beaucoup à offrir à la
littérature et au monde.
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