Alors que le groupe a accepté de conditionner le
vaccin Pfizer-BioNTech, syndicats et élus continuent de dénoncer la nouvelle
saignée de la recherche.
Dans la grisaille et le froid d’un matin
de janvier, les locaux flambant neufs du « campus » de Sanofi ont dû, mercredi,
cohabiter avec des drapeaux syndicaux et slogans placardés contre les rambardes :
« Travailleurs de la R&D en danger ». Devant le siège social du géant
pharmaceutique français à Gentilly (Val-de-Marne), les motifs de la colère ne
manquaient pas aux salariés et politiques venus se rassembler. Gilet rouge sur
le dos, écusson « Sanofric » attaché à sa veste, Pascal Collemine s’affaire, un
rouleau de Scotch à la main, autour de la banderole de la CGT. « La
direction va annoncer un nouveau plan de restructuration ce jeudi en CSE
central, qui s’ajoute à celui qui a été annoncé en juin 2019 et qui n’est
toujours pas fini ; 400 postes de chercheurs seront supprimés en pleine
pandémie, c’est irresponsable de la part de Sanofi. Je n’ai pas de mots pour
décrire ce qu’il se passe, si ce n’est intolérable », martèle le
chimiste et délégué syndical central CGT pour la branche recherche du groupe.
« La loi permet la réquisition des moyens de production »
Au-delà des revendications sociales, c’est
bien le symbole d’un groupe pharmaceutique qui privilégie ses intérêts
financiers alors qu’une pandémie fait rage, que sont venus fustiger les
salariés, aux côtés d’élus du Parti communiste français (à l’initiative de la
mobilisation) et de la France insoumise. « Sanofi, c’était onze
laboratoires il y a dix ans, il n’y en a plus que quatre aujourd’hui, et
bientôt plus que trois », rappelle le secrétaire national du PCF et
député du Nord, Fabien Roussel. « Le tout en ayant versé, pour la seule
année 2020, près de quatre milliards d’euros de dividendes à ses
actionnaires », ajoute-t-il.
La direction de Sanofi, dont le groupe est
très en retard dans la course au vaccin contre le Covid-19, a bel et bien tenté
de faire taire le feu nourri de critiques. Mardi soir, dans un communiqué de
presse, le géant du CAC40 indiquait avoir signé un accord pour participer au
processus de production de la formule de son concurrent Pfizer-BioNTech,
prenant en charge, à partir de cet été, le conditionnement sur son site
allemand de Francfort. Mais, derrière les effets d’annonce, le compte n’y est
pas, assure le cégétiste Pascal Collemine. « Ces déclarations sont
beaucoup trop faibles par rapport à nos capacités de production. D’autant plus
que l’accord de Sanofi ne porte que sur le flaconnage, on pourrait utiliser
beaucoup mieux notre outil industriel », explique-t-il.
De son côté, la sénatrice communiste Laurence Cohen
préfère voir le verre à moitié plein et attribue tout le mérite de cette
première victoire à la mobilisation populaire et politique. « On ne
peut que se réjouir d’une telle annonce, même s’il reste encore beaucoup à
faire pour que les vaccins soient enfin des biens publics accessibles à tous », note
l’élue. Notamment interdire le brevetage des vaccins pour que les précieux
sérums puissent être produits librement. Voire même aller encore plus loin,
recommande Fabien Roussel. « Sanofi et tous les autres laboratoires qui
vendent leur vaccin sont purement des marchands. Non seulement il faut extraire
les laboratoires de leurs logiques de profit et lever les brevets, mais il faut
aussi demander la réquisition des moyens de production pharmaceutique. La loi
le permet », fait-il valoir. Réunis devant le siège de la
multinationale, élus comme salariés se sont promis de ne pas abandonner le
combat.
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