Difficile d’envisager scénario plus lourd
de menaces que celui qui se déroule sous nos yeux. Le déni de la victoire
probable du candidat démocrate, peinant à dégager une majorité nette malgré le
bilan calamiteux de son adversaire ; l’effarante proclamation de réélection du
président sortant, à sa manière habituelle de truquer la réalité, alors que le
décompte des voix en cours ne la laisse pas présager… Le tout sur fond de
recours interminables qui dilueront le message des électeurs dans l’eau de
cuisine des cabinets d’avocats. Le beau succès de participation civique, qui
montre que le mot « démocratie » a toujours du sens pour le peuple des
États-Unis, en dépit d’un climat de campagne bas du front, se trouve gâché par
ce lamentable épilogue.
Viendra le temps d’examiner les fautes de
Joe Biden et de son état-major, galvanisés par des sondages trompeurs prédisant
une victoire facile. Incroyablement, s’est rejouée presque à l’identique une
partie du scénario qui avait coûté les clés de la Maison-Blanche à Hillary
Clinton, en 2016. Mais la responsabilité de la déroute échoit sans équivoque à
Donald Trump, qui a donné toute la mesure de son talent de bonimenteur dans une
déclaration post-électorale taillée pour chauffer à blanc ses partisans,
convaincus désormais que si le démocrate est élu contre leur champion, ce sera
le fait d’une fraude massive.
Cette « trumperie » de la pire espèce ouvre la voie à
une période de troubles dont on ne sait dans quelle aventure elle peut
entraîner la première puissance mondiale. Mais elle ne doit pas faire écran à
cette autre réalité, tout aussi préoccupante pour l’avenir : en quatre années
de présidence, le trumpisme a indéniablement solidifié son ancrage chez les électeurs,
se montrant beaucoup plus mobilisateur qu’escompté, malgré sa gestion
catastrophique de la crise du Covid-19. Cette extrême droite qui a fait
l’expérience du pouvoir sans en sortir essorée lance un sacré défi aux forces
démocratiques du monde entier.

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