Alors que le pic de saturation dans les hôpitaux
approche, l’assistance publique a décidé de suspendre l’activité de ce service
de l'établissement parisien pour redéployer le personnel dans ses autres
structures franciliennes.
Un bis repetita aux allures de scandale.
Ce lundi, la direction de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP) a
annoncé la fermeture des urgences de l’Hôtel-Dieu. Comme lors du premier
confinement, ce service du plus ancien hôpital parisien, situé au cœur de la
capitale, laissera donc place à un centre de dépistage Covid. À l’approche du
pic de saturation des hôpitaux franciliens, cette décision brutale ne passe
pas. « C’est complètement absurde, tacle Gérald Kierzek,
médecin urgentiste dans la structure. On l’a appris ce lundi, à 8 h 30,
et ce sera effectif mercredi. Au lieu de se servir de cet hôpital pour
désengorger les autres, on préfère traiter les personnels comme des pions et
les redéployer ailleurs, notamment à Cochin. Alors que l’Hôtel-Dieu aurait pu
être à la fois un volant de sécurité pour le Covid et assurer le maintien des
soins conventionnels. Sachant qu’une partie des malades qui n’ont pas pu être
soignés pendant la première vague sont en ce moment hospitalisés à travers le
pays. »
Alors que les déprogrammations
d’opérations se généralisent à nouveau, que les capacités d’hospitalisation,
notamment en pneumologie, se réduisent un peu partout, pour les soignants,
aucune leçon n’a été tirée. « Nous sommes dans une crise hospitalière
plus que sanitaire, précise Christophe Prudhomme, médecin urgentiste à
Avicennes (Bobigny) et porte-parole de l’Amuf (l’Association des médecins
urgentistes de France). Si les urgences ne sont pas encore débordées
comme en mars, le manque de lits nous met dedans. Or, il y a des locaux
disponibles dans les étages de l’Hôtel-Dieu pour en ouvrir. On pouvait aussi
très bien combiner les urgences, qui consistent en de la petite traumatologie,
et l’organisation des tests Covid. » Dans tous les cas, le médecin a
l’impression de marcher sur la tête. « C’est bien beau de reconfiner
les gens, mais ce qui fonctionne, c’est de tester massivement ! Il faudrait
aussi remettre des lits de réanimation, 8 000 à 9 000 en permanence,
contre 5 000 aujourd’hui, ce qui correspond à une période normale. »
L’entreprise de démolition du service public se poursuit
Si cette attaque contre la vénérable
institution s’inscrit à rebours des besoins criants, elle est également loin
d’être isolée. Depuis 2013, l’Hôtel-Dieu a été petit à petit désossé, en
réduisant les capacités des urgences et en supprimant notamment
l’ophtalmologie. Le coup de grâce a été donné il y a un an et demi, avec
la vente à la découpe d’un tiers de sa surface à la société Novaxia, prévoyant
la création d’un restaurant gastronomique et de magasins… Durant la première
flambée de la pandémie, les voix des syndicats CGT et FO mais aussi de
représentants politiques, des communistes ainsi que de la maire de Paris, Anne
Hidalgo, s’étaient alors élevées pour demander sa réquisition afin de prendre en charge des patients Covid-19.
Sans succès. Le directeur général de l’AP-HP, Martin Hirsch, avait argué de la
vétusté de certains équipements. Une information immédiatement contestée par
les syndicats.
Avec cette deuxième fermeture des urgences (qui
avaient rouvert depuis juin, après la descente de la première vague – NDLR),
l’entreprise de démolition de ce service public se poursuit. Laissant planer la
menace d’une porte définitivement close. « On le redoute, soupire
Gérald Kierzek. C’est aberrant, les malades vont être nombreux à rester
sur le carreau, alors que nous avons les ressources et tout le matériel pour
soulager d’autres hôpitaux. »

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