L’exécutif détaille ce jeudi matin son plan de
100 milliards d’euros. Emmanuel Macron et Jean Castex préparent aussi
plusieurs réformes afin d’enterrer définitivement le monde d’après dès cet
automne.
La présentation du plan de relance du
gouvernement, sur RTL, marque une rentrée politique décidément très à droite
pour la Macronie. Loin de relever les défis posés par le Covid, en s’attaquant
à toutes les injustices mises en lumière, l’Élysée cherche à enterrer le monde
d’après pour imposer des réformes qui risquent d’aggraver la crise.
Au moins, le gouvernement n’avance pas
masqué : « C’est un plan de relance de l’offre et de
l’investissement », a annoncé Jean Castex, lors des universités d’été
du Medef. Sans surprise, le plan de relance sera donc de droite, en grande
partie dirigé en faveur des grands patrons et des actionnaires. L’exécutif
privilégie les cadeaux au capital au détriment des travailleurs et des ménages,
au motif que leurs revenus auraient déjà été « préservés ». Le
premier ministre fait ainsi fi des grandes inégalités économiques et sociales
exacerbées par la crise sanitaire et de l’occasion historique de relancer
l’économie à partir de la réponse aux besoins des populations et de la
répartition des richesses créées.
Un plan de relance pro-CAC 40
Sur les 100 milliards d’euros mis sur
la table, un tiers de la somme sera même consacré à la « compétitivité ».
Comprendre, la baisse de la fiscalité des entreprises, qui n’auront à souffrir
d’aucune conditionnalité sociale ou environnementale en contrepartie. Le tout
après avoir déjà bénéficié de plus de 100 milliards liés au Cice sans pour
autant créer le million d’emplois promis alors par Pierre Gattaz, ex-patron du
Medef. Ces pertes de recettes massives pour l’État annoncent déjà la rigueur
budgétaire à venir : le déficit devra « retrouver son niveau de fin
2019 d’ici à la fin du quinquennat », affirme Jean Castex. Les
services publics, pourtant si utiles et d’autant plus en temps de crise, sont
déjà dans le viseur.
Au plus fort de la crise, Emmanuel Macron n’avait
plus assez de mots pour louer le travail indispensable des « métiers
essentiels » : caissières, éboueurs, manutentionnaires, professeurs,
chauffeurs livreurs… Ces femmes et ces hommes « que nos économies
reconnaissent et rémunèrent si mal ». Si, à l’issue des négociations du
Ségur de la santé, les personnels soignants, en première ligne pendant la
crise, ont obtenu des revalorisations salariales qu’ils estiment d’ailleurs
insuffisantes, les salariés de la deuxième ligne attendent toujours des actes.
Mi-mai, Muriel Pénicaud, alors ministre du Travail, avait assuré que les
branches professionnelles seraient convoquées afin de prendre en compte ces
métiers « qui ont besoin d’être valorisés ». En septembre, toujours
rien. Pis, ceux qui étaient aux avant-postes pendant le confinement, souvent
précaires, vont recevoir en guise de récompense deux réformes particulièrement
nocives que le gouvernement ne veut pas abandonner malgré les larges
oppositions. Celle de l’assurance-chômage, dont certaines mesures sont
reportées à 2021, et celle des retraites promise « avant la fin du
quinquennat » par Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État en charge
du dossier.
La grande diversion sur l’insécurité
La crise du Covid a mis en lumière toute
la nocivité des choix politiques pris par Emmanuel Macron depuis son élection.
Comment faire diversion, tout en préparant au passage le terrain pour 2022 ? En
multipliant les déclarations sur l’insécurité et en promettant une loi contre
les « séparatismes » pour la rentrée, comme le fait le premier
ministre, Jean Castex. Son ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, va encore
plus loin, multipliant quotidiennement les provocations. Loin de porter jusqu’à
présent des mesures concrètes pour lutter contre les incivilités et l’insécurité,
il s’attelle méthodiquement à instiller un climat d’insécurité pour détourner
les esprits du monde d’après à bâtir. Celui qui parle d’ « ensauvagement » de
la société malgré des statistiques stables assène également qu’ « avoir
le droit d’asile ne créer par le droit de mettre le bordel », dans le
plus pur style sarkozyste. Si le droit à la sécurité doit bien sûr être garanti
à tous, les coups de menton de l’exécutif visent surtout à masquer un « séparatisme » qu’il
organise lui-même : celui des plus riches d’avec les pauvres.
Des territoires mis en concurrence
Dans les discours, Emmanuel Macron et son
premier ministre, Jean Castex, ne cessent de louer les territoires. À les
entendre, ils souhaiteraient confier un rôle toujours plus important aux
maires, aux départements et aux régions pour relever la longue liste des défis
posés par le Covid. Celui du respect des règles sanitaires, bien sûr, mais
aussi celui de l’amortisseur social, de la relance économique et du débat
citoyen. Problème : la loi 3D que concocte l’exécutif est une bombe à
retardement pour les collectivités locales. Derrière son surnom se décline une
volonté de « décentralisation, déconcentration et différenciation ».
Officiellement, l’objectif serait de « faire confiance au terrain », mais
la réalité du projet est tout autre.
Le gouvernement veut poursuivre à tout prix la mise en
concurrence des territoires, qui donc fera des gagnants et des perdants en les
montant, les uns contre les autres sur le terrain économique. Il souhaite aussi
faire voler en éclats le principe d’unicité de la République en permettant
de « différencier » les lois selon les territoires, au risque
de rompre avec la promesse d’égalité. De quoi renforcer les conséquences
négatives du Covid plutôt que d’y remédier. Enfin, le projet suscite l’ire des
représentants des associations d’élus locaux, qui le trouvent trop « technique » et
sans garantie de pouvoirs et moyens suffisants.
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