« Inutiles » en mars, les masques sont
désormais obligatoires quasiment partout. Pour autant, ils sont toujours
payants. Avec la rentrée cette protection contre le Covid 19 va peser lourd
dans les budgets des familles. À moins que le gouvernement ne les rende
gratuits.
Le confinement avait démarré au mois de mars par le scandale de la pénurie
de masques, y compris pour les personnels soignants, et du mensonge sur sa prétendue
« inutilité ». Désormais, cet outil nécessaire à la prévention des
contaminations par le Covid 19 est disponible en nombre. Et bien que de plus en
plus obligatoire partout sur le territoire (il le sera notamment dès le 1er
septembre dans les entreprises), il est payant. Dès que la date du
déconfinement avait été annoncée par Emmanuel Macron en avril dernier, des
responsables politiques, notamment à gauche se sont préoccupés de cette
question et ont lancé des appels et engagé des initiatives en faveur de la
gratuité des masques. L’Humanité avait d’ailleurs lancé une pétition en ce sens
dès le 6 mai.
En cette rentrée, la bataille pour la gratuité reprend de l’ampleur. Au
point que des collectivités territoriales ont dû reprendre l’initiative et
mettre elles-mêmes leurs finances à contribution pour distribuer des masques
aux lycéens et collégiens à la rentrée scolaire. C’est le cas notamment des
régions Île-de-France, Hauts-de-France et Occitanie. Mais aussi de
départements. La Seine-Saint-Denis distribuera ainsi des masques en tissus pour
les collégiens, de même que le département du Val-de-Marne. Durant le
confinement déjà, de nombreuses collectivités territoriales s’étaient
mobilisées pour produire et distribuer des masques.
Pour l’instant, le gouvernement rejette toujours l’idée d’une gratuité des
masques. Le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer s’est même
réfugié derrière l’augmentation de 100 euros de l’allocation de rentrée
scolaire, considérant que celle-ci servait également à l’achat de ces
protections pour les élèves… « Je suis en profond désaccord avec la déclaration
du ministre de l’Éducation affirmant que le masque sera « une fourniture
scolaire comme une autre », a vivement critiqué la présidente de la région
Occitanie, la socialiste Carole Delga, et qu’il devrait être supporté par les
familles au même titre que l’achat d’une « trousse » ou de « cahiers ». La
situation dans laquelle nous sommes aujourd’hui réclame des mesures
exceptionnelles, sanitaire mais aussi sociale. Le port du masque en milieu
scolaire en est une », a ajouté l’élue. Le président du département du
Val-de-Marne, le communiste Christian Favier, est sur la même ligne : « même si
on est amené à fournir des masques, nous continuons de demander la gratuité pour
tous, compte tenu de l’obligation de la porter qui se généralise. On voit que
ça peut peser très lourd dans le budget d’une famille, à peu près
228 euros par mois pour une famille de 4 personnes. Si ça doit durer
pendant plusieurs mois, c’est très lourd ». Selon Christian Favier, « le port
du masque est une mesure de santé publique. À partir de ce moment-là, il doit
être pris en charge. Peut-être par la sécu. En tout cas par les pouvoirs
publics, sans que cela soit soumis à la bonne volonté d’une collectivité. Je
rappelle qu’elles n’ont pas toutes les mêmes moyens financiers ». L’idée d’une
prise en charge selon les principes fondateurs de la République comme de la
sécurité sociale, c’est aussi ce que défend le président de la
Seine-Saint-Denis, le socialiste Stéphane Troussel. « L’école est laïque,
publique, gratuite et obligatoire, rappelle-t-il. La Sécurité sociale rembourse
à 100 % les médicaments irremplaçables. Or face au Covid, le masque est
irremplaçable. Dans la philosophie qui fonde la sécu, on cotise selon ses
moyens et on reçoit selon ses besoins. Les élèves ont besoin de masques ».
C’est aussi avec cet argument que le PCF réclame la prise en charge des
masques par la sécurité sociale, et pas uniquement pour les scolaires, mais
pour tous. Il n’est pas seul à gauche à avoir une revendication en faveur de la
gratuité. Les députés de la France Insoumise avaient déjà déposé un projet de
loi en ce sens dès le 28 avril dernier, par le biais d’une prise en charge
par l’État. Mardi 25 août, ce sont des élus de l’opposition, dont Yannick
Jadot (EELV) et Damien Abad (LR) qui ont joint leurs efforts pour réclamer la
gratuité pour les scolaires au gouvernement. En Seine-Maritime, le député
Sébastien Jumel, le maire de Dieppe, Nicolas Langlois, la sénatrice Céline
Brulin, les maires du Tréport et d’Eu, Laurent Jacques et Michel Barbier, ont
publié une lettre ouverte réclamant au gouvernement de passer commande aux 500
entreprises de la filière de production française pour assurer la gratuité des
masques aux élèves de 11 ans et plus. « À considérer que le masque serait
une fourniture scolaire comme une autre, écrivent les élus communistes, le
risque est grand de banaliser cet objet de protection et au bout du compte de
renforcer les inégalités sociales de prévention et de santé. Ce n’est pas la
conception que nous nous faisons de la République pour tous et partout ». Avec
la FCPE, des parents d’élève se mobilisent également : une pétition a été mise
en ligne par l’association le 21 août.
Pour l’instant, le gouvernement fait la
sourde oreille. Avec l’installation de la crise sanitaire dans la durée, il va
devoir faire face à une campagne en faveur de la gratuité qui monte en
puissance. Finira-t-il par l’entendre ?
Diego Chauvet
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