dimanche 23 août 2020

« LE SPECTRE DE MAÏDAN », L’ÉDITORIAL DE STÉPHANE SAHUC DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR




La Biélorussie sortira-t-elle par le haut de la crise qui la secoue actuellement ? La réponse est entre les mains d’Alexandre Loukachenko. Celui qui préside aux destinées du pays depuis près de trois décennies est indubitablement le premier responsable de la colère des Biélorusses. Même si une partie du peuple lui sait encore gré d’avoir assuré et garanti, durant ces décennies, la satisfaction des besoins fondamentaux : santé, emploi, logement… quand les pays de l’ancien camp soviétique subissaient des cures d’ultra­libéralisme entraînant explosion des inégalités, misère et désespoir.

Mais le régime autocratique qu’il a mis en place atteint aujourd’hui un point de rupture. La mascarade des résultats a été la goutte d’eau qui fait déborder le vase de la colère. Loukachenko doit en prendre la mesure et reconnaître qu’il doit partir sans céder à la tentation répressive. Pour que l’issue soit dans l’intérêt du peuple biélorusse, il faut également que les « Occidentaux » et les Russes assument que cette sortie de crise est aussi de leur responsabilité.

Tous doivent avoir en tête le catastrophique précédent ukrainien et au cœur la volonté de laisser le peuple biélorusse décider de son destin. Le fait qu’Emmanuel Macron et Angela Merkel plaident pour une « coordination » entre l’UE et la Russie pour dénouer la situation et que Moscou accueille favorablement cette proposition va dans le bon sens. Mais la lecture de l’article de BHL dans le JDD est plus inquiétante. Il y relève benoîtement que Svetlana Tsikhanovskaïa, l’opposante principale, est encadrée par les services secrets de Vilnius, « la ville courage, en première ligne face à Poutine », et par la Freedom House, historiquement liée à la Ligue anticommuniste et profondément russophobe. Eux veulent avant tout une Biélorussie sous influence occidentale au détriment de Moscou. Sans oublier au passage de passer l’économie du pays dans la lessiveuse de la libéralisation. Si c’est dans cette voie que s’engage l’après-Loukachenko, alors le poison nationaliste l’emportera une nouvelle fois au détriment de la démocratie.

Stéphane Sahuc


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