Les associations de l’aide à domicile font
partie des organisations conviées au Ségur de la santé. Elles attendent que les
nouvelles politiques en discussion n’oublient pas leurs salariés, essentiels
face à l’épidémie. Entretien.
Avec son réseau de 2 700 associations présentes dans 92 départements,
l’UNADMR (Union nationale de l’aide à domicile en milieu rural) est un poids
lourd de l’accompagnement du handicap et des services et soins des seniors à
domicile. En première ligne face à l’épidémie, ses 95 000 salariés doivent
pourtant subir de petits salaires et des contrats souvent précaires. L’attente
du secteur est donc forte avant le Ségur de la santé et l’annonce de la
création d’un cinquième risque couvrant la dépendance.
Que comptez-vous dire au ministre de la Santé ?
Thierry d’Aboville Je vais rappeler que la politique de la santé dispose de trois
acteurs : les hôpitaux, les Ehpad et l’aide à domicile. Aucun ne va sans
l’autre, il ne faut donc oublier personne. J’ai aussi envie de revenir sur la
question de la prime de 1 000 euros, dont on ne sait
toujours pas si elle sera versée un jour à nos salariés… Et je rappellerai que
nous avons besoin de la création d’un vrai cinquième risque de la Sécurité
sociale, et vite, avec des financements à la hauteur. Des réflexions lancées
qui ne débouchent sur rien, on a déjà connu ça. Mais la crise sanitaire a
provoqué sur une vraie prise de conscience. Les gens ont vu que les associations
d’aide à domicile étaient vite entrées en action contre l’épidémie. Nous
participons à desserrer l’étreinte. Nos métiers sont essentiels. Pourtant, ils
ne sont pas attractifs, avec un salaire net moyen de 900 euros par mois.
Comment le secteur sort-il de ces deux derniers mois ?
Thierry d’Aboville Il a fallu se battre à chaque étape. Il y a eu la question des
masques, longtemps réservés au seul personnel soignant, mais pas à nos
salariés, pourtant eux aussi en première ligne ; les problèmes liés aux
déplacements de nos salariés ; et enfin, la question de la prime de 1 000
euros. Pour nous, celle-ci doit relever de la solidarité nationale, donc
être portée par l’État. Il s’agit d’un plus non négligeable pour tous nos
professionnels qui ont de petits salaires. C’est aussi une reconnaissance
exprimée par la nation à tous ces gens qui avaient des inquiétudes pour leur
santé, celle de leur famille ou de leurs patients. Et malgré ces peurs, il n’y
a eu aucune défection. En revanche, cette prime ne doit pas être vue comme un
solde de tout compte, mais comme une reconnaissance ponctuelle du rôle de nos
organisations et de nos salariés qui doit enclencher une revalorisation
salariale complète et durable. Nous demandons une revalorisation de 16 %,
surtout pour les salaires en dessous du Smic, du fait des faibles niveaux de
rémunération en début de grille. La proposition est entre les mains du
ministère de la Santé. On lui dit chiche ! S’il veut une vraie prise en compte
de la dépendance, qu’elle se traduise déjà en actes.
La constitution d’une nouvelle branche de la Sécurité sociale pour prendre
en charge la perte d’autonomie, assise sur une caisse pour assurer les
financements, va-t-elle dans le bon sens ?
Thierry d’Aboville Aujourd’hui, nos
financements arrivent par petits bouts, ici et là. Une caisse unique avec un
fléchage des financements offrirait une meilleure visibilité. On y est donc
favorables. Mais nous avons toujours dit que le « cinquième
risque » doit être couvert par la solidarité nationale, afin d’assurer
une égalité de traitement sur l’ensemble du territoire. L’autonomie doit être
prise en charge de la même façon à Mulhouse ou à Rennes. Ce n’est pas le cas.
Parmi les 750 000 personnes auprès desquelles nous intervenons, il n’est pas
rare de voir certaines d’entre elles renoncer à une prise en charge faute de
moyens, du fait d’un reste à charge trop élevé. C’est particulièrement le cas
en milieu rural, où les pensions ne sont pas très élevées.
Entretien réalisé par Stéphane Guérard
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