L’affaire des masques de protection devient le sparadrap rouge collant aux
basques du pouvoir. Pour une famille, le budget peut atteindre plus de 200
euros par mois. Exigeons leur gratuité.
Par Patrick Le Hyaric, directeur de l'Humanité.
ll y eut d’abord ces mensonges en série
sur leur inutilité pour camoufler une pénurie qui n’a rien de naturelle.
Celle-ci découle d’une part de la destruction de nos industries textiles
considérées comme dépassées par les grands penseurs du libéralisme et leurs
serviteurs au pouvoir depuis des décennies, et d’autre part des choix de
réduction des crédits publics poussant au « zéro stock », également présenté
comme le nec plus ultra de la modernité. Cette pénurie a mis en danger
soignants comme patients. Elle est sans doute responsable de nombreuses
contaminations et décès.
Puis, au fil des semaines, le masque est
devenu utile, indispensable même, alors que les soignants continuaient d’en
manquer. Et le pouvoir souhaite désormais le rendre obligatoire dans les
transports publics.
Depuis quelques jours, ce qui n’existait
pas tombe par paquets de millions, mais sur les étals des supermarchés, comme
produit d’appel pour attirer le chaland qui devra demain reprendre les
transports en commun. Le scandale est encore plus gros quand on sait que cette opération a
été annoncée tambour battant il y a huit jours dans un communiqué commun de la
Fédération du commerce et de la distribution et du secrétaire d’État auprès du
ministre de l’Économie et des Finances, et présentée comme un haut fait d’armes.
De qui se moque-t-on ? Une commission d’enquête parlementaire doit rapidement
faire la clarté la plus nette sur une affaire qui a plus à voir avec le
mercantilisme qu’avec la santé publique.
Les masques ne peuvent être des
marchandises étalées aux caisses des supermarchés pour grossir le ticket de
caisse, attirer et fidéliser les clients. Ils sont un moyen de protection
civile et collective, et un outil de santé publique. À ce titre, ils devraient
être assurés, en lien avec les collectivités, par les services de la Sécurité
civile. Si les travailleurs contraints de reprendre leur activité venaient à
contracter le virus faute d’avoir pu accéder à des masques de protection,
l’État serait comptable d’une mise en danger délibérée de la vie d’autrui. Et
la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen nous rappelle que « la
société a le droit de demander compte à tout agent public de son
administration ». Et, l’article 11 du préambule de la Constitution confirme
bien ce « droit à la protection ». En conséquence, les masques doivent être
gratuits.
Certains pays européens l’ont décidé. Des
collectivités locales également. Pourquoi le gouvernement de la sixième
puissance mondiale ne le pourrait-il pas ? Ce pays ou l’argent des dividendes
continue de couler à flots, ce pays où l’on peut en une nuit débloquer des
milliards pour consolider des entreprises dont la trésorerie est loin d’être à
sec. Pourquoi une famille de quatre personnes qui a déjà du mal à joindre les
deux bouts doit encore alourdir ses dépenses du mois de 80 à 150 euros pour
assurer sa santé et celle des autres ? On nous dit que les prix des masques
seront bloqués en deçà de 1 euro, soit peu ou prou leur prix de revient.
Pourtant, plusieurs témoignages indiquent que non seulement ce prix est pour l’instant
fictif, mais qu’en plus on trouvait en janvier des masques à seulement 8
centimes. Une prise en main par l’État imposant la gratuité couperait court à
toute tentative de spéculation.
Réclamons partout et par tous les moyens
la gratuité des masques. Il en va de l’intérêt public. Et, pour une fois,
appuyons-nous sur cette déclaration de Mme Agnès Buzyn le 29 janvier dernier :
« Si un jour nous devions proposer à telle ou telle population ou personne à
risque de porter des masques, les autorités sanitaires distribueraient ces
masques aux personnes qui en auront besoin. » C’était certes pour cacher la
pénurie. Mais, aux actes maintenant ! Lançons un grand mouvement pluraliste
pour la gratuité des masques !
Par Patrick Le Hyaric, directeur de l'Humanité
Normal le droit à la santé
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