Emmanuel Macron décide. Jean-Claude Blanquer
exécute. Chargé de mettre en musique la volonté jupitérienne, le ministre de l’Éducation
nationale a commencé à détailler hier, tant bien que mal, ses premières pistes
pour une reprise progressive de l’école à partir du 11 mai. Exercice de haute
voltige, tant le choix controversé de cette date, décrétée par le chef de l’État,
s’est dispensé de toute assurance scientifique, que ce soit sur le risque de
transmission des plus jeunes où l’immunité acquise des enseignants en l’absence
de tests à grande échelle. De fait, l’empressement présidentiel a pris tout le
monde de court. Jusqu’à son propre exécutif. Et, compte tenu du retard de la France
dans la gestion de la pandémie, cette réouverture des classes étalée sur trois
semaines reste des plus hasardeuses. Autant que sont trompeuses les raisons
invoquées officiellement.
Selon le « storytelling » concocté par l’Élysée,
il s’agirait, pour Emmanuel Macron, de ne pas se laisser creuser les inégalités
scolaires en temps de confinement. On en aurait presque la larme à l’œil si on
omettait que, depuis 2017, les réformes conjuguées du lycée, de Parcoursup et
de la filière professionnelle provoquent exactement l’inverse. Non, le chef de
l’État, un brin hypocrite, n’a pas eu de révélations en lisant Bourdieu. Son but
est de faire revenir un maximum de parents au travail, afin de remettre en
route une machine économique en capilotade et de rassurer les sacro-saints
marchés. Au prix de relancer potentiellement l’épidémie ? C’est le risque
pris en haut lieu.
Le brouillon présenté par Jean-Michel Blanquer n’offre
aucune assurance sur le plan sanitaire. Et s’est dispensé de toute concertation
approfondie avec les personnels. Tiraillée entre le désir de retrouver leurs
élèves et la peur de servir de chair à canon, les profs exigeaient des mesures
précises. À l’heure qu’il est le ministre n’est pas en mesure de leur assurer
le minimum syndiacal. Inquiétant. Au Japon, sur l’Île d’Hokkaido, les écoles
avaient été rouvertes depuis le 6 avril. Avant de refermer la semaine dernière
face à la multiplication des cas de contamination. La précipitation coupable du
gouvernement pourrait bien avoir les mêmes conséquences.
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