jeudi 27 octobre 2022

« Lula face au pouvoir du stylo », l’éditorial de Cathy Dos Santos dans l’Humanité.



Tous les coups bas sont permis au Brésil. On connaissait la nuisance des fausses informations, ou encore les mensonges avérés qui circulent sur les réseaux sociaux. On avait sans doute sous-estimé la puissance de l’État, transformé en machine de guerre contre Luiz Inacio Lula da Silva. Elle pourrait faire basculer l’issue du scrutin présidentiel de dimanche. Au terme d’une sale campagne, l’ancien syndicaliste devance d’une courte tête Jair Bolsonaro, galvanisé également par l’incroyable influence des églises évangélistes auprès des plus humbles. Bien décidé à conserver son fauteuil du palais du Planalto, le chantre de l’extrême droite a endossé les habits du Messie, et s’en est allé prêcher sur des terres réputées à gauche. Pour capter l’électorat populaire, l’ex-militaire a bénéficié d’un atout majeur: largent. On appelle cela le «pouvoir du stylo».

Jair Bolsonaro aligne les chèques depuis le premier tour. Les aides sociales perçues par 20 millions de personnes ont été revalorisées et leur versement avancé de plusieurs jours avant l’élection. Un demi-million de Brésiliens supplémentaires seront désormais bénéficiaires de ces conquis sociaux mis en place par Lula et poursuivis par Dilma Rousseff. Jair Bolsonaro le sait, les grands programmes sociaux ont cimenté la popularité des gouvernements du Parti des travailleurs. Aujourd’hui, ce pays continent compte 33 millions de ventres creux qui votent. Et la faim est parfois mauvaise conseillère. Ironie de l’histoire, lorsqu’il était député, Jair Bolsonaro ne manquait jamais une occasion d’accuser la gauche d’acheter le vote de ses concitoyens humbles grâce à ses politiques sociales.

Dans la dernière ligne droite, le candidat de l’ultradroite s’est vu aussi gratifier du soutien du monde des entreprises, certains patrons usant du chantage à l’emploi sur leurs salariés pour qu’ils ne votent pas en faveur de Lula. Le môme du Nordeste, lui, espère un retour à la normalité gouvernementale, après quatre années de désastres en chaîne. Chaque voix sera décisive pour faire la différence. Un écart net et franc sur son rival sera indispensable pour éviter tout déchaînement de violence dans un pays où plus de 4 millions d’armes circulent librement. Les partisans de Bolsonaro sont déjà chauffés à blanc. Aucun des scénarios, même le pire, n’est écarté.

 

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