Le poison du présidentialisme aura fait son œuvre sans
relâche jusqu’aux dernières heures de la campagne. D’abord en promettant depuis
des mois, par le jeu d’un mode de scrutin qui écarte les voix de dizaines de
millions d’électeurs d’un tour à l’autre, la réédition du duel final de 2017
Macron-Le Pen, dont la majorité des Français ne veulent pas. Et même quand est
apparue une lueur d’espoir de déjouer ce funeste scénario au second tour, que
croit-on qu’il advint ? La logique toxique du présidentialisme a repris le dessus, transformant
l’espoir en chantage au « vote utile » pour des centaines de milliers d’électeurs de gauche.
Il n’y a que dans l’élection présidentielle française,
qui allie scrutin majoritaire à deux tours et concentration des pouvoirs unique
au monde entre les mains du vainqueur, que l’on peut trier les suffrages des
électeurs pourtant égaux en droit entre votes « utiles » et ceux qui ne le seraient pas. Dans ce système, les soutiens des candidats crédités de moins
de 15 % dans les sondages doivent rentrer dans le rang, sous
peine d’être accusés de favoriser l’adversaire commun. Le moyen et la fin sont
inversés : les
querelles de tactique électorale
prennent le pas sur l’adhésion à un projet
de société. L’extrême droite
contre laquelle chacun se bat est constamment remise au centre du jeu, tandis
que des électeurs convaincus de voter à gauche sont repoussés vers l’abstention
plutôt que de se laisser dicter leur choix.
La candidature de Fabien Roussel fait au contraire le
pari que c’est en retrouvant le sens de la démocratie que la droite et
l’extrême droite reculeront. Nombre d’électeurs ont confié leur soulagement de
voir leurs idées retrouver droit de cité avec Fabien Roussel comme
porte-parole. Il est redevenu possible de débattre du mode de production
énergétique dans le cadre de la lutte pour sauver le climat ou de donner de la
noblesse au mot « populaire ». Surtout, il est redevenu possible de parler de « Jours
heureux ». L’intérêt suscité par la campagne du candidat communiste montre que le pays et la gauche en
ont grand besoin.
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