vendredi 28 janvier 2022

« Bruits de bottes et jeu de dupes », l’éditorial de Cathy Dos Santos dans l’Humanité.



L’Europe n’est pas condamnée à compter les points, alors que se noue à ses portes, à la frontière russo-ukrainienne, un nouveau conflit. Les menaces, les coups de menton doivent cesser car les conséquences du scénario à l’œuvre sont lourdes de dangers. La France, qui préside l’Union européenne, doit peser de tout son poids, en jouant la carte de la désescalade auprès des principaux acteurs du conflit – la Russie, l’Ukraine, les États-Unis et l’Otan. Les bruits de bottes doivent cesser. Le jeu de dupes aussi.

L’origine de la crise ne peut être imputée aux seules visées impériales de Vladimir Poutine, dont la politique est largement critiquable. L’Alliance atlantique ne peut justifier le déploiement d’une armada au prétexte que le président russe a massé 100 000 soldats à sa frontière. Elle agite le spectre d’une intervention militaire « imminente », en montrant elle aussi les muscles, mais se dédouane de sa responsabilité. L’élément déclencheur de cette poussée de tensions est la possible intégration de Kiev en son sein. On rappellera ici l’accord tacite qui était censé prévaloir au lendemain de la dislocation de l’URSS, à savoir le non-­élargissement de l’Otan aux pays proches de la Russie. Or, depuis 1999, l’organisme n’a cessé d’accroître son influence, en recrutant dans ses rangs les pays Baltes, la République tchèque, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie. Soyons sérieux, la sécurité en Europe ne peut reposer sur une organisation inféodée aux États-Unis et dont l’essence même est de faire la guerre.

La Chine, pourtant jusqu’alors discrète sur le dossier, alors même qu’elle est dans le viseur de Washington, a prié la Maison-Blanche de répondre favorablement à la demande du Kremlin de mettre fin à l’élargissement de l’Otan et de revenir à ses déploiements aux frontières de 1997. Fin de non-recevoir. La suite n’est pourtant pas écrite. Après Paris, les pourparlers entre Kiev et Moscou se poursuivront à Berlin. La France a une carte de choix entre ses mains, si elle s’extrait du giron mortifère de l’Alliance, qui se pose en gendarme du monde.

 

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