mercredi 17 novembre 2021

« Sortir des fantasmes », l’éditorial de Cédric Clérin dans l’Humanité.



Si on est pris dans la spirale médiatique, on pourrait s’en étonner. À Calais, qui est un centre névralgique pour la migration en France depuis de longues années, la solidarité s’enracine. Malgré l’air du temps qui souffle assez fort dans un sens qui pourrait laisser croire que l’inhumanité serait une solution à des problèmes soi-­disant insurmontables, de nombreux citoyens répondent présent pour aider celui qui en a besoin. Pourquoi le font-ils alors que tout dans le débat public pointe les migrants comme principaux maux de nos sociétés ? Qu’est-ce qui les différencie des polémistes qui ne cessent de crier au loup ? La réalité, tout simplement. Les uns la connaissent dans ses drames humains et ses impasses politiques, les autres l’imaginent et s’en servent pour de funestes desseins. Ceux qui ont fait le choix d’aider les migrants à Calais savent de quoi ils parlent. Ils ne sont pas seulement de doux militants idéalistes, mais d’indispensables vigies qui n’ont pas perdu le sens commun.

« Nous sommes à la dérive. Collectivement. » C’est le président de la commission d’enquête parlementaire sur les migrations, animée par deux députés élus avec la Macronie en 2017, qui le dit. « La réalité de l’immigration en France est déformée par le débat public », constatent par ailleurs les parlementaires. Les demandeurs qui obtiennent les titres de séjour ne représentent que 0,3 % de la population et sont pour la plupart étudiants, loin du fantasme du chasseur d’allocations, nouvelle figure du voleur de poules. En fait, « la majorité des migrants sont des migrantes. Leur niveau d’instruction moyen est supérieur à la moyenne du pays d’arrivée ». La conclusion s’impose : « Le migrant est simplement un être humain ne méritant ni excès d’opprobre ni éloges disproportionnés. »

Dès lors, sorti des fantasmes, le seul chemin raisonnable est de rompre avec la gestion sécuritaire des migrants qui nous couvre de honte, et de construire une politique d’accueil. C’est ce chemin que tracent les acteurs de la solidarité à Calais. Merci à eux.

 

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