Le candidat communiste à
la présidentielle a tenu son premier grand meeting dimanche, place Stalingrad,
à Paris. En écho aux préoccupations des 3 000 participants, il a multiplié les
propositions pour le pouvoir d’achat et une juste répartition des richesses, à
commencer par une augmentation du Smic de 20 % et le triplement de l’ISF.
Disparus de nombreux radars médiatiques à cinq mois de l’élection
présidentielle, les salaires, les conditions de travail ou encore l’emploi ont
été à l’honneur dimanche sur la place Stalingrad, à Paris, où le candidat
communiste à l’Élysée, Fabien Roussel, a tenu son premier grand meeting devant
3 000 personnes. Un rendez-vous démarré littéralement en fanfare avec une
troupe de batucada. Dès 11 h 30, alors que la musique bat son plein,
Jean-Philippe Juin, chasuble CGT sur le dos, est là avec quelques-uns de ses
collègues de la Fonderie du Poitou. « On veut liquider nos emplois,
nous, on se bat pour les préserver, on est en dedans », explique le délégué
syndical dont le combat porte aussi sur les salaires. « On est payés
1 800 euros net, à la fin du mois c’est de plus en plus difficile. On a
demandé une augmentation de 150 euros qu’on n’a pas obtenue mais on estime
qu’il faudrait au moins 300 euros par mois supplémentaires pour vivre
décemment », poursuit-il.
Les motifs de colère sont nombreux, pointe en écho Fabien Roussel à son
arrivée sur la scène du meeting. Alors oui, nous, nous voulons que ça
change, maintenant. » Le député du Nord embraye sur sa « première
mesure » : « augmenter le Smic de 20 %, pour le porter à
1 500 euros net, 1 800 euros brut, dès le printemps 2022 ».
Les factures qui augmentent
Mais face à la vie chère qui gagne du terrain, il insiste aussi sur
l’inscription « dans la loi de l’augmentation de tous les salaires en
fonction de l’inflation ». Tandis que la droite et l’extrême droite veulent
imposer du matin au soir les thèmes de l’immigration ou de la sécurité, Onur,
microentrepreneur dans le Val-de-Marne qui paie cher les conséquences de la
crise, s’offusque : « Les gens n’en ont rien à foutre de la couleur,
d’où on vient, ils veulent juste pas avoir à se demander à la fin du mois
comment ils vont pouvoir manger. La campagne doit porter là-dessus. » « D’ailleurs,
s’il y avait une meilleure répartition des richesses, ces questions se
poseraient beaucoup moins », lâche l’une de ses camarades.
Cette urgence, Corinne, qui a fait le déplacement depuis Roubaix, dans le
Nord, la connaît bien. « On fait attention à tout, la moindre dépense,
on doit tout calculer, j’ai même une application dans mon téléphone pour
vérifier mon budget », raconte-t-elle. Au chômage, elle s’est engagée avec
la CGT pour aider les privés d’emploi à faire valoir leurs droits. Elle redoute
pour eux les conséquences de la réforme de l’assurance-chômage, surtout avec
les factures qui augmentent. « Moi, je suis mensualisée chez EDF mais
j’ai reçu un rappel de 400 euros. Comment je peux faire ? Je suis obligée
de négocier un échéancier qui s’ajoutera aux autres », pointe-t-elle,
jugeant indispensable de faire baisser la note en jouant sur les taxes, comme
son candidat le propose. « À côté, on voit les actionnaires se remplir
les poches… Le fossé se creuse. C’est un discours qui peut paraître classique
mais c’est la réalité », martèle Corinne.
« Relancer l’espoir de la belle vie »
Un message que Fabien Roussel est lui aussi déterminé à faire passer. « Macron
a été le serviteur le plus zélé de la finance. Le président des riches, nous
n’en voulons plus », tacle le candidat. « Nous voulons l’abolition
de ces privilèges, l’abolition du régime spécial du capital », scande le
député du Nord, qui dessine « un objectif simple : éradiquer le
chômage » (lire ci contre). En matière de financements, il ne manque
pas de ressources et entend non seulement récupérer les « 123 milliards
d’euros par an de cadeaux aux entreprises, aux plus riches », mais aussi
tripler l’ISF ou encore mettre en place un « impôt Covid
exceptionnel » sur « les bénéfices au-delà de
500 000 euros » des multinationales. Nationalisations d’Axa, de
la BNP ou de la Société générale sont aussi au programme pour « maîtriser
le nerf de la guerre, l’argent », tout comme un nouveau pacte européen qui
rompt avec l’austérité et mobilise 6 % du PIB européen par an, soit
900 milliards d’euros. « Rendez l’argent ! », résume-t-il,
pointant les nombreux besoins dans les services publics.
D’ailleurs, bas salaire et fin de mois difficile, Arbia ne sait que trop
bien de quoi on parle. Venue depuis l’Essonne, cette accompagnante d’élève en
situation de handicap (AESH) brave la pluie glacée sur la place Stalingrad.
Chaque mois, sa fiche de paie n’aligne que 800 euros. « Ils
détruisent tout ce qui nous permet de vivre ensemble, tout ce qui nous
rassemble, comme l’éducation. Il y a trop de pression, chacun gère ses
problèmes tout seul », déplore-t-elle, tout en souhaitant pour 2022
voir « relancer l’espoir de la belle vie ». C’est pour ça qu’elle
est là comme Marcelle, salariée de Carrefour, qui témoigne sur scène et veut
qu’on prenne « conscience que les bas salaires ne doivent plus exister
dans notre pays ». Ou encore Camille, aide-soignante, qui estime
qu’on « doit pouvoir finir les fins de mois » mais aussi
travailler dans des conditions décentes. Pour les rémunérations, « l’État
donnera l’exemple », s’engage Fabien Roussel, promettant à « celles
et ceux qui font vivre nos services publics, qui sont en première ligne, que
nous avons applaudis pendant les confinements une augmentation d’au moins
30 % ».
Reste que Corinne
est « sidérée que les gens ne se bougent pas plus ». Et que si
Hugo, un étudiant qui se dit communiste mais affilié à aucun parti, juge
nécessaire « même à 2 % de faire entendre ces questions-là »,
il se dit « électoralement pessimiste ». C’est aussi ce que Fabien
Roussel a tenté de battre en brèche dimanche, pointant « cinq mois
imprévisibles, ouverts ». « Rien n’est écrit parce que nos
concitoyens se placent encore à distance de ce rendez-vous », a-t-il
estimé, appelant à la mobilisation et comptant sur cette « démonstration
de force » parisienne pour lui donner de l’élan et percer le mur du
silence autour des préoccupations populaires.
Un an pour établir l’égalité salariale
Qualifiant de « honte » les écarts de salaires entre les femmes et les
hommes dans de nombreuses filières, Fabien Roussel entend « mettre un terme
définitif à cette injure faite à la moitié de l’humanité ». Et ce au plus
vite : « Il ne faudra pas cinq ans pour obtenir l’égalité salariale »,
promet-il, en rappelant que « depuis le 3 novembre dernier, les femmes de
France travaillent gratuitement ». Le candidat à la présidentielle prévoit de
rendre cette égalité salariale effective en six mois dans la fonction publique.
Concernant le privé, il veut « donner un an aux entreprises pour la mettre en
œuvre ». Si tel n’est pas le cas, « l’État nommera un administrateur judiciaire
qui aura la charge de le faire, à la place de l’employeur », prévoit le
secrétaire national du PCF.
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