"Il a été un homme
essentiel". La comédienne Ariane Ascaride a annoncé sur Facebook la mort
du réalisateur Marcel Bluwal, à l’âge de 96 ans.
Il est un de ceux que l’on appelle communément un grand monsieur de la
télévision. Marcel Bluwal a opéré longtemps derrière l’écran, loin des
regards des téléspectateurs. Son enfance, il l’a vécue dans le
12e arrondissement de Paris, quartier populaire qui l’a ouvert au
communisme, à contre-courant des idées de son père, juif polonais plutôt
bourgeois. C’est aussi là qu’il prit goût au cinéma, au moment où les salles
obscures pullulaient encore à chaque coin de rue. Suivront ainsi, après des
débuts au département jeunesse, sa série Vidocq (avec Claude Brasseur) ou son
célèbre « Dom Juan » ou le festin de pierre, avec Michel Piccoli et
de nouveau Claude Brasseur. Marcel Bluwal fut également un homme de cinéma avec
trois films « Le Monte-charge » en 1962, « Carambolages »
en 1963, et « Le Plus Beau Pays du monde » en 1999.
Il fut aussi un homme de théâtre, montant « Le
Misanthrope » de Molière ou encore « Mort d'un
commis voyageur » d'Arthur Miller, et dernièrement en 2018 « Dialogue
aux enfers » : Machiavel - Montesquieu, de Maurice Joly.
"Voilà il y a un mois, écrit Ariane
Ascaride nous étions tous ensemble à savourer le bonheur de
passer un dimanche après-midi. Marcel s’est aujourd’hui envolé vers d’autres
horizons inconnus. Monsieur Marcel Bluwal a été appelé vers des contrées si
lointaines que rien ni personne ne pourra le faire revenir Mon chagrin est
immense, je lui souhaite un beau voyage , il a été un homme essentiel".
« Je traitais tous les conflits en espérant que pour le public, il en
sortirait une exaltation révolutionnaire » expliquait en 1972 Marcel
Bluwal, ne concevant pas son art sans engagement. Compagnon de route
du Parti communiste français dans les années 50 -il adhère officiellement
en 1970, avant de quitter le PCF en 1981. Il participe toutes ces
années en tant que représentant du syndicat des réalisateurs CGT à la
commission d'homologation des réalisateurs.
« Nous avions envie de faire de la télévision et de faire la
télévision ».
Le cinéaste décryptait pour France culture, en 2014, ses choix de réalisation, d’acteurs et de mise en scène, lui qui donna un sens à l’image sur petit écran et qui fut l’un des pionniers de la télévision sociale. Il dira d’ailleurs, concernant son adaptation des Misérables, avoir voulu « exalter le drame social, le soulèvement du peuple ». L’homme livre au passage une analyse éclairée sur cette télévision qu’il a aidée à se transformer, qu’il a ensuite observée muer… jusqu’à s’éloigner peu à peu de son objectif initial, celui défini par le programme culturel du Conseil national de la Résistance : « informer, cultiver, distraire ». Mission que ce « hussard noir » aura toujours eu à cœur d’appliquer à destination des classes populaires – le fameux « mineur d’Anzin », ancêtre de la ménagère de moins de cinquante ans.
En 2009, un retour marqué à la télévision
A quatre-vingt-deux ans, Marcel Bluwal avait souhaiter tourner une série en quatre parties, intitulée « À droite toute », pour France 3. Avec, en toile de fond, l'histoire de la Cagoule. C'est en voyant « Jusqu'au bout », le film de Maurice Failevic, que le démon l'a repris. Pour camper l'industriel Salmon, Marcel Bluwal a fait appel à Bernard-Pierre Donnadieu. Celui qui incarnait un syndicaliste dans le film de Failevic prend cette fois les traits d'un grand bourgeois au milieu de la montée de l'extrême droite dans les années 1935-1939.
Aujourd’hui, l’audace se
fait rare, semblait-il insinuer, tant les patrons des chaînes sont aux
commandes des créations. Marcel Bluwal avoue d’un souffle s’être
longtemps « battu pour être le premier de la classe » mais en
vient toujours « à (se) dévaloriser assez facilement ». « J’ai
donc accepté d’être à ma place », lâche-t-il dans cette série radio.
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