Le patronat n’ouvre jamais le portefeuille de bon cœur quand il s’agit de
parler salaires. Il faut qu’il soit parvenu au point où ne pas le faire risque
de lui coûter plus cher, en pertes de chiffre d’affaires et de rentabilité,
pour envisager d’infléchir le partage de la valeur ajoutée en faveur des
travailleurs. Ce moment de bascule est proche. Dans certains secteurs en
tension comme le BTP, la logistique, l’agriculture, les services à la personne
ou la restauration, la pénurie de main-d’œuvre est telle que le patronat est au
bord de la crise de nerfs. Ce n’est pas seulement le temps maussade qui freine
le service en terrasse, mais une météo des recrutements au plus bas. À l’heure
où les étudiants regagnent leurs amphis, les offres d’embauche languissent aux
vitrines des cafés, tandis que les vendanges pourraient bien tourner au
vinaigre si les saisonniers manquent à l’appel.
Partout, les jambes et les bras se font désirer dans ces métiers qui, en
plus d’être difficiles, sont très mal payés. Alors que la reprise pointe son
nez après une année de chômage forcé pour cause de pandémie, les candidats sont
rares à accepter de se casser le dos pour des salaires de misère. Qui osera les
blâmer ? Que celui qui n’a jamais ployé sous une hotte de 80 kilos de
raisin ramasse la première grappe, avant de donner des leçons.
C’est une loi du
capitalisme : les invisibles ne cessent de l’être qu’une fois qu’ils cessent de
se sacrifier pour la bonne marche de la société. Ce qui, en soi, vaut tous les
plaidoyers pour la revalorisation des salaires. Celle-ci ne saurait être payée
sur les deniers de l’État, comme le souhaite le patronat déjà gavé d’aides
publiques. Ni compter comme prix du silence sur tout le reste : les conditions
de travail, la pénibilité, les cadences, la formation, la réduction du temps de
travail… La Fête de l’Humanité des 10, 11, 12 septembre et la journée
d’action intersyndicale du 5 octobre seront des moments forts pour en
débattre et faire entendre les revendications incontournables.
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