L’humoriste aux envolées
surréalistes, auteur de gags mémorables, est mort. Il avait 64 ans. La maladie
de Charcot aura eu raison de son humour.
Mme Ledoux Germaine est en deuil. Elle ne pourra plus converser au
téléphone avec des inconnus au hasard du bottin. Son neveu de gendarme ne
pourra plus sauver la veuve et l’orphelin. Jean-Yves Lafesse est mort et les
extra-terrestres ont décidé de ne plus envahir le Doubs. Quant aux escargots du
Brésil bouffeurs de chien, ils viennent de demander l’asile politique en Bretagne...
Il n’y avait que lui pour nous faire prendre des vessies pour des
lanternes, une carotte pour un micro. Il avait révolutionné la caméra cachée,
façon arte povera, rien dans les mains, tout dans les mots, piégeant, toujours
respectueusement, le quidam dans la rue. Il ferrait sa proie avec douceur, et
savait la ramener dans son aire de jeu. Dans la rue, il improvisait en fonction
de la personne croisée au hasard, pouvait débiter des horreurs avec le plus
grand sérieux du monde et un sourire enjôleur. Il était grossier, jamais
vulgaire. Son humour n’était ni préfabriqué, ni surgelé mais irrévérencieux,
iconoclaste, absurde.
Au téléphone, Jean-Yves Lafesse s’aventurait dans des histoires
abracadantesques en compagnie d’inconnus qui se métamorphosaient en
personnages, lui donnant la réplique sans sourciller, conversant naturellement
avec lui. Échanges surréalistes empreints d’une très grande humanité, on
retiendra combien ses interlocuteurs pris dans le feu de la conversation,
étaient prêts à tout pour venir en aide à la bonne vieille Mme Ledoux ou à un
certain M. Robert, échappé de l’hôpital psychiatrique.
C’était un humoriste
singulier, libre qui a donné ses lettres de noblesse au canular, à l’imposture
pour démasquer les bons comme les cons, les généreux comme les égoïstes.
C’était “un déconneur professionnel” comme il disait, de ceux qui ne trichent
pas avec les gens; un type sincère, bourré de talent. A l’instar d’un Coluche,
Desproges ou Bedos, l’humour de Jean-Yves Lafesse était un contre pouvoir à la
bien pensance, un contre poison à la connerie. Salut l’artiste…
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