La Commune s’est
attaquée à la question des salaires minimum et maximum pour l’avènement d’une
« République réellement démocratique ». Aujourd’hui, la gauche est toujours sur
le pont, alors que les écarts de rémunération au sein des grandes entreprises
atteignent des niveaux vertigineux.
Avec une rémunération de près de 25 millions d’euros, le patron le
mieux payé de France, celui de Dassault Systèmes, Bernard Charlès, engrange en
douze mois plus de 1 670 Smic annuels. Les patrons du CAC 40 gagnaient en
moyenne 240 fois le Smic en 2015, contre 277 fois en 2018.
Aussi vieilles que le salariat, les inégalités salariales figuraient déjà
en bonne place parmi les préoccupations des communards. Non seulement les
révolutionnaires de 1871 introduisent l’idée d’un « minimum de rémunération »,
mais ils s’attaquent aussi à la hiérarchie des salaires avec un décret qui
limite les plus hauts revenus dans les services communaux. « Dans une
République réellement démocratique, il ne peut y avoir ni sinécure ni
exagération de traitement », justifie le texte officiel, à rebours complet du
discours libéral en cours cent cinquante ans plus tard.
Le refus de limiter les
salaires repose sur le même argument – la fuite des plus fortunés – que la
suppression de l’ISF, c’est non seulement inacceptable mais cela se révèle
faux. PIERRE DHARRÉVILLE Député PCF
Car Emmanuel Macron a beau déplorer que « notre pays tout entier tient sur
des femmes et des hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si
mal », c’est la gauche qui porte toujours le « flambeau » de cette lutte. En
juin dernier, une proposition de loi socialiste a été déposée à l’Assemblée
pour limiter les écarts de salaire de 1 à 20, comme le porte la Confédération
européenne des syndicats. Sans suite, évidemment. Pourtant, « les
surrémunérations des uns font les restrictions salariales des autres », estime
le député PS Boris Vallaud, qui entend tendre vers un écart de 1 à 12 en
supprimant les exonérations fiscales au-delà.
Déjà en 2016, les communistes avaient défendu une proposition pour
interdire des écarts de rémunération au-delà de 20… rejetée. « Un tabou
demeure. Le refus de limiter les salaires repose sur le même argument – la
fuite des plus fortunés – que la suppression de l’ISF, c’est non seulement
inacceptable mais cela se révèle faux », explique le communiste Pierre
Dharréville, qui a, depuis, à plusieurs reprises, déposé des amendements en ce
sens.
Interdire les stock-options
« On a tenté 1 à 20, puis 1 à 50 et enfin 1 à 100, à chaque fois cela a été
refusé », se désole le député, soulignant que « cette règle est vertueuse car
l’augmentation de celui qui est le mieux payé provoque celle de celui qui l’est
le moins ». C’est non seulement juste mais aussi efficace économiquement,
insiste aussi Boris Vallaud : « Emmanuel Faber, alors PDG du groupe Danone, a affirmé qu’en
diminuant de 30 % les salaires des 1 % des salariés les mieux payés
de son groupe, il serait possible de doubler le salaire des 20 % les moins
bien payés », argue l’élu.
Et au plus haut sommet de la pyramide : « Regardez ces grands PDG qui
viennent de se remplir les poches pendant la crise du Covid. Prenons l’exemple
d’un d’entre eux. Si Bernard
Arnault avait donné tous les jours 8 000 euros depuis la révolution de
1789, encore aujourd’hui il n’aurait perdu que 1 % de sa fortune », a
interpellé Jean-Luc Mélenchon, reprenant le rapport d’Oxfam de 2020. L’insoumis compte
également cette mesure à son programme. Mais aussi, comme le PCF,
l’interdiction des stock-options, parachutes dorés et autres retraites
chapeaux.
Entre hommes et femmes
Il est aussi un autre
écart de salaire auquel la Commune s’est attaquée : celui entre les rémunérations des hommes et celles des
femmes. Il demeure de 23 % en moyenne, selon les données 2017 de l’Insee,
alors que le principe « à travail égal, salaire égal » est pourtant consacré
par le droit du travail. Outre les déroulements de carrière, « légiférer sur le
recours aux temps partiels contraints et la revalorisation des métiers
déconsidérés, souvent avec une forte représentation féminine, est un point
névralgique », assure Pierre Dharréville. Après cent cinquante ans, il est
temps.
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