Les États-Unis ne sont pas devenus la nouvelle patrie du socialisme. Voilà
qui devrait rassurer certains éditorialistes, ceux qui font de l’orthodoxie
néolibérale l’alpha et l’oméga de la pensée économique. Mais de l’autre côté de
l’Atlantique les choses bougent. Il suffit de regarder l’ampleur du plan
d’investissement dans les infrastructures, de 2 000 milliards, d’écouter
Janet Yellen, la nouvelle secrétaire d’État au Trésor, à propos d’une taxe sur
les géants du numérique et de l’instauration d’un impôt minimal sur les
sociétés, et de se souvenir de la proposition de doubler le salaire minimum.
Le pragmatisme, dont on dit qu’il est une qualité typiquement
états-unienne, n’est pas absent de ces récentes annonces de la nouvelle
administration Biden. Mais il n’y a pas que cela. Si l’administration Biden
peut se permettre d’avancer de telles propositions, c’est aussi qu’elle y est
contrainte par le rapport de forces. La victoire du candidat démocrate l’année
dernière n’est pas uniquement basée sur un rejet de Trump. Elle est également
le marqueur d’une aspiration à autre chose. Illustration de cet état d’esprit,
ce sondage qui montre que, pour 73 % des Américains, l’augmentation des impôts
pour les plus riches doit constituer une « priorité extrêmement
importante » pour Biden.
Ce n’est pas le grand
soir aux États-Unis, mais le Figaro parle de « la seconde mort
de Ronald Reagan ». Que Tina ( There is no alternative, « Il
n’y a pas d’alternative », pensée chère à Thatcher) soit autant malmenée
outre-Atlantique met douloureusement en relief le fait que le néolibéralisme et
l’ordolibéralisme restent les doctrines qui guident les choix économiques en
Europe et en France. Ici, le gouvernement annonce le retour du dogme du 3 % de
déficit, une nouvelle révision des politiques publiques se traduisant par un
nouveau recul des services publics, et l’instauration d’une « règle
d’or » de rigueur budgétaire qui contraindrait les gouvernements
suivants à rester dans l’orthodoxie néolibérale. Et si, plutôt que d’écouter
des vieilles lunes, on regardait ce qui se passe à l’ouest.

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