lundi 29 mars 2021

 


« Relever la tête », l’éditorial de Maurice Ulrich.

Avec le nez masqué dans le Covid, on en arrive à ne plus voir le paysage. Les débats politiques ont pris un tour délétère. L’odieuse campagne lancée par la ministre Frédérique Vidal ­autour du prétendu islamo-gauchisme n’en finit pas de faire des vagues avec de multiples répliques. La presse de droite et ses éditorialistes n’en peuvent plus et on peut s’attendre, avec l’arrivée aujourd’hui au Sénat du projet de loi sur le « séparatisme », rebaptisé en projet « confortant le respect des principes de la République », à de nouvelles surenchères.

Comme dans le monde de George Orwell ou « la guerre, c’est la paix, la liberté, c’est l’esclavage », on assiste à une véritable perversion du langage. Le simple fait d’évoquer les colonisations, les discriminations, les mémoires des oppressions serait devenu la nouvelle figure de l’intolérance ! Et c’est un ministre de l’Éducation nationale, ayant lui-même parrainé la création d’un syndicat étudiant croupion et corrompu, qui accuse l’Unef de n’être pas loin du fascisme ! Ce week-end, la candidate PS aux régionales en Île-de-France se voit accusée par le candidat de LaREM de contribuer à « la construction de la pensée raciste », au simple motif qu’elle comprenait la mise en place de groupes de parole non mixtes. Le débat politique se déporte toujours plus à droite, mais la gauche n’est pas épargnée par les écarts, quand on voit à l’occasion des anathèmes se substituer aux arguments.

Dans ce contexte, la question d’un report éventuel des élections régionales n’est pas anecdotique. On voit bien qu’il éviterait à la majorité un nouveau camouflet, en attendant des jours meilleurs. Mais, de manière plus fondamentale, on ne peut en user avec les élections comme avec des commerces non essentiels. Nous sommes, en ces jours, qu’on l’accepte ou non, des mineurs se conformant aux décisions d’en haut. C’est ce qu’on appelait dans les années 1970 la biopolitique. On s’occupe de vous, mais avec quelques restrictions de citoyenneté. Le risque serait de s’y habituer sans relever la tête. 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire