Le Forum économique de Davos, dont la 51e
édition largement virtuelle s’est ouverte lundi, est aussi un haut lieu du
dédoublement de la personnalité. Ainsi, là où se retrouvent d’ordinaire quelque
2 000 dirigeants du monde et des multinationales dans les hôtels et chalets de
luxe avec un appréciable bilan carbone, un prix attribué dimanche à plusieurs
personnalités a distingué parmi celles-ci le photographe Sebastiao Salgado,
dont les images ont fait plusieurs tours du monde de la misère et de
l’exploitation.
Klaus Schwab, son fondateur, dans une
récente tribune, invitait à « repenser le capitalisme », alors
que la pandémie a « exacerbé les inégalités ». De fait, elles
sont phénoménales et, depuis plusieurs années, l’organisation Oxfam attire
l’attention sur le fossé qui se creuse entre les hyper-riches et le reste de la
population mondiale, avec un accroissement de la pauvreté qui pourrait toucher
cette année 500 millions de personnes supplémentaires (l’Humanité du 25
janvier). Pour la seule France, le total des fortunes des dix milliardaires en
tête du classement Challenges avoisine les 400 milliards
d’euros, soit quatre fois le plan de relance censé relever l’économie face à la
crise sanitaire avec des conséquences économiques et sociales qui deviennent dramatiques.
Il ne s’agit pas seulement d’un constat d’injustices.
Ce qui est en question, c’est un désordre qui insulte la raison et la notion
d’humanité elle-même, c’est le devenir d’un monde qui marche sur la tête. Mais,
ne soyons pas naïfs. Nombre de participants au sommet de Davos en sont
conscients, mais ne renonceront pas. Il n’y a que les peuples pour changer la
donne. Lundi, également, au moment même de l’ouverture du Forum, Emmanuel
Macron tenait une visioconférence avec une centaine de grands patrons étrangers
pour vanter l’attractivité de la France. « Il leur dira, annonçait
un conseiller de l’Élysée, que nous ne retournerons pas en arrière. Il
n’y aura pas de retour de l’impôt sur la fortune, ni d’abolition de la baisse
de l’impôt sur les sociétés. Il faut donner de la visibilité aux
investisseurs. »
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