La large Coordination contre ce texte entend
poursuivre ses efforts. D’autant plus que le gouvernement annonce vouloir
réécrire une partie du projet, dans une tentative de reculade qui n’apporte
aucune garantie.
Ne rien lâcher et continuer la
mobilisation. Tel est le mot d’ordre de la Coordination très large qui a
organisé, samedi dernier, des manifestations et des rassemblements dans toute
la France, contre la loi de « sécurité globale » et les violences policières.
Coordination qui, dans sa diversité, ne s’est pas trompée, en observant le
rétropédalage ce lundi, de Christophe Castaner, le président du groupe LaREM à
l’Assemblée nationale, sur la « réécriture » du fameux
article 24. « Ce nouvel épisode, rocambolesque, montre à quel
point la mobilisation de samedi a été forte. C’est une première victoire. On
sent qu’on tient le bon bout, et que nous avons raison », commente
Emmanuel Vire, secrétaire national du SNJ-CGT. Pas question donc d’en rester
là, pour la Coordination, qui s’est donné pour but l’abrogation pure et simple
des articles 22, 23 et 24, en plus de la réécriture du « schéma
national du maintien de l’ordre » (SNMO).
Comment continuer, alors ? D’abord en
structurant toujours plus le mouvement impressionnant qui regroupe « des
syndicats, des associations, de la Société des journalistes du Figaro aux
gilets jaunes », détaille Emmanuel Vire. « Nous voulons que la
pression soit maintenue, que des initiatives diverses fleurissent partout en
France, des manifestations, des rassemblements, des happenings… » détaille-t-il.
C’est dans cet esprit que, samedi, à Paris et dans un certain nombre d’autres
villes, se tiendront de nouveaux rendez-vous. À la base, les sans-emploi
devaient défiler, ils le feront, avec l’aval des confédérations syndicales,
dans des cortèges communs. L’idée n’est pas de se mesurer aux manifestations
monstres de samedi dernier, mais de durer, de continuer ce bras de fer avec le
pouvoir. Jusqu’à ce que le SNMO soit réécrit et que cette loi soit retirée,
parce « qu’elle ne menace pas que les journalistes, mais chaque
citoyen », martèle Emmanuel Vire. « Les collègues d’Italie, de
Belgique et d’Allemagne hallucinent devant les interventions policières en
France ; ça ne se passe pas du tout comme ça dans leur pays », affirme
le syndicaliste.
La Coordination n’est d’ailleurs pas dupe
du jeu de la majorité présidentielle. « Le gouvernement nous fait
croire qu’il va réécrire l’article 24, alors qu’il n’a plus la main sur la
proposition de loi, qui est au Sénat », s’agace Emmanuel Vire. Il ose
le mot pour définir la mascarade de lundi : « des menteurs ». Car,
au fond, seule une promesse a pour l’heure été obtenue. « C’est une
pitrerie. La Macronie habille bien mal son début de reculade. Le texte est au
Sénat désormais. Il ne fallait pas le voter en première lecture et ce n’est pas
faute d’avoir alerté, mais maintenant, c’est trop tard. Désormais, le plus sage
est de retirer la loi », mesure également le député PCF Stéphane
Peu. « C’est votre ministre Gérald Darmanin qui a promis d’interdire
les images des forces de l’ordre sur les réseaux sociaux. Pendant de longues
semaines, vous l’avez laissé dire, vous l’avez laissé faire. Votre honneur
serait de retirer ce texte de loi », a lancé le premier secrétaire du
PS, Olivier Faure, à l’adresse du premier ministre, mardi, lors des questions
au gouvernement.
« Outrageant pour le Sénat »
Jean Castex assure, pour sa part, qu’il
s’agit toujours d’un « excellent texte ». Mais, puisque
l’article 24 « a posé des questions sur la liberté d’expression et
la liberté de la presse », en visant à empêcher citoyens et journalistes de
filmer la police, le chef du gouvernement souhaite « remettre le
chantier sur l’ouvrage tant que le doute n’est pas levé ». Un travail a été
ouvert entre députés LaREM de la commission des Lois et Matignon pour proposer
une nouvelle version sous quinze jours, en dehors de tout cadre
institutionnel. « C’est outrageant pour le Sénat », s’étouffe
la députée PS Cécile Untermaier, qui appelle le gouvernement à respecter la
procédure législative et les travaux de la Chambre haute. Il pourra ensuite
reprendre la main sur le texte une fois que le Sénat l’aura examiné, et
modifié. Car les sénateurs ont déjà annoncé leur volonté de le réécrire (sans
quoi la voie aurait été ouverte à une adoption du texte tel que déjà validé par
les députés !). Le parlementaire LR Philippe Bas estime même que
l’article 24 a été « écrit avec les pieds » en plus
d’être « inconstitutionnel ». Mais ce n’est pas tout : le président
de la Chambre haute, Gérard Larcher, s’est indigné de la réécriture parallèle
lancée à l’Assemblée. Mardi, lors d’une allocution solennelle au palais du
Luxembourg, il a martelé que c’est « au Sénat et à lui seul » d’examiner
et de réécrire le projet. L’élu a rappelé « l’article 24 de la Constitution :
“le Parlement vote la loi” » défendant le bicamérisme et ajoutant
que personne d’autre que les Chambres « n’est habilité à réécrire un
texte de loi en cours de navette », l’une après l’autre.
La Macronie coche ainsi toutes les cases de la crise
politique et institutionnelle. Mais une « urgence » demeure : « Retirer
ce texte, qui pose de nombreux problèmes, et pas que sur l’article 24. On
ne peut pas accepter de voir se développer des polices privées et un usage
disproportionné des drones de surveillance », insiste Stéphane Peu.
C’est encore à ce jour tout l’enjeu de la mobilisation.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire