Inutile de se cacher derrière les mots :
la « réécriture » annoncée de l’article 24 de la
proposition de loi de sécurité globale est une forme de suspension qui ne dit
pas son nom. C’est-à-dire la mise en sommeil de l’article, dans sa version
actuelle, qui s’attaque au droit de diffuser les images de policiers en
intervention. C’est donc un premier recul du pouvoir. Et un acquis à l’actif du
profond mouvement démocratique contre cette dérive liberticide. Un acquis, non
une victoire : on en est même encore loin, tant l’option que Christophe
Castaner a eu pour mission de présenter sent l’entourloupe à plein nez.
Une réécriture, pour quoi faire ? N’en
était-il pas déjà question dans l’idée vite abandonnée par Jean Castex, la
semaine dernière, d’une « commission indépendante » dédiée à
cette tâche, soit dit en passant au mépris le plus total du Parlement ?
L’avenir dira si la promesse de « nouvelle écriture complète de
l’article » n’est qu’une manière d’habiller une retraite, ou s’il
s’agit d’un subterfuge pour gagner du temps en comptant sur l’essoufflement de
la mobilisation. Mais de sérieux indices penchent pour le second choix. Le
ministre des Relations avec le Parlement a ainsi indiqué que le vote des mêmes
dispositions dans un autre projet de loi était une piste sur la table.
Reste qu’on n’avait pas connu depuis longtemps un tel
revirement sur un texte tout juste adopté en première lecture à l’Assemblée
nationale. Il fallait se retenir pour ne pas s’esclaffer, lundi, devant les
mots de Christophe Castaner : « L’incompréhension s’est intensifiée… » En
fait d’« incompréhension », c’est la pression sur le pouvoir qui est devenue
insoutenable sous les effets conjugués de la protestation contre
l’article 24, de la crise déclenchée jusqu’au sein du camp présidentiel,
de la réprobation internationale, et de l’émotion populaire après le tabassage
de Michel Zecler par trois policiers filmés à leur insu. La suite n’est pas
écrite : réécriture ou retrait définitif de la loi, tout dépendra de celle de
la mobilisation en cours.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire