vendredi 27 novembre 2020

« Permis de tabasser », l’éditorial de Stéphane Sahuc dans l’Humanité.



Que se passe-t-il dans notre pays ? Comment trois policiers peuvent-ils agresser et rouer de coups durant vingt minutes un homme sur son pas de porte ? Que se passe-t-il dans nos institutions pour que trois individus portant l’uniforme de gardien de la paix se comportent comme les pires nervis d’extrême droite ? Pour qu’un préfet se croie autoriser à organiser une chasse aux migrants dans les rues de la capitale ? Que se passe-t-il dans notre République pour qu’une loi qui prévoit une limitation inédite de la liberté de la presse et des libertés en général soit adoptée sans coup férir à l’Assemblée ?

Que se passe-t-il au sommet de l’État pour que des ministres se permettent de traiter des parlementaires en opposition avec leur politique comme des complices du terrorisme ? Que se passe-t-il à la tête du pays pour qu’un président de République dirige son pays à travers un Conseil de défense au mépris d’une représentation nationale abaissée comme rarement ?

La crise démocratique, politique et économique dans laquelle la France est engluée depuis des années est amplifiée par les choix calamiteux du gouvernement dans le contexte de la crise sanitaire.

L’exécutif ne tient plus son autorité que de la police. C’est pour protéger ce qu’il nomme d’ailleurs « les forces de l’ordre », rempart d’un pouvoir délégitimé, que le gouvernement tente d’imposer sa loi de sécurité globale, quoi qu’il en coûte. Cette tactique dangereuse endossée par Darmanin résonne chez certains policiers comme un permis de tabasser. Preuve avec cette glaçante vidéo d’un producteur frappé au sang par des agents, à la mode outre-Atlantique ?

Déjà premières victimes de la pauvreté qui s’étend avec la crise sanitaire, les jeunes des quartiers populaires endurent cette réalité depuis des années. Tout comme les migrants, les sans-papiers et les réfugiés, ainsi que la France des ronds-points et des gilets jaunes. Plus personne n’est à l’abri de ce sentiment d’impunité de certains policiers.

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