« Nous devons tenir. » Lors de son allocation du 28 octobre,
Emmanuel Macron a usé de la première personne du pluriel, jouant le chef d’État
rassembleur face au défi d’une pandémie en plein essor et d’un reconfinement
forcé. Mais la réalité s’accorde mal avec la grammaire présidentielle. C’est
bien le singulier qu’il aurait fallu employer, tant cette gestion de crise
relève de l’exercice solitaire du pouvoir et du déni démocratique. Le
Parlement, ravalé au rang de chambre d’enregistrement, est aujourd’hui sous
cloche. La prolongation de l’état d’urgence sanitaire devrait être adoptée
jusqu’en février, exonérant l’exécutif de tout vote au cas où il souhaiterait
poursuivre le confinement et mettre en place d’autres dispositifs d’exception.
Comme si ces mesures attentatoires aux libertés allaient de soi et n’avaient
pas à être débattues par la représentation nationale…
40 Conseils de défense
Cette visée autocratique ne s’arrête pas
là. Le Conseil des ministres lui-même est aujourd’hui court-circuité par un
« Conseil de défense », devenu le lieu-clé de cette gestion de crise. Depuis le
début de l’année, Emmanuel Macron l’a réuni quarante fois ! Créée en 1959 pour
prendre des décisions de stratégie militaire, cette instance devenue le
Matignon bis présente l’avantage d’être composée au choix du président et de
voir ses discussions couvertes par le secret-défense. Discrétion assurée.
Erreurs stratégiques
Évidemment, tout cela est fait au nom de « l’efficacité »,
de la nécessité d’aller vite face à un virus retors. Argumentaire de mauvaise
foi. En fuyant le débat parlementaire et citoyen, le chef de l’État se met en
situation de démultiplier les erreurs stratégiques, telles celles qui ont
plombé la gestion des masques ou encore des tests, au printemps dernier. Mais,
surtout, il suscite la défiance de la population autour de mesures sanitaires
décidées en vase clos, accentuant le risque de voir ces dernières contestées et
la lutte contre le Covid perdre, justement, en « efficacité »… N’en
déplaise à Emmanuel Macron, la démocratie reste un bien essentiel. En
toutes circonstances.
Laurent Mouloud

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