L’annonce d’un couvre-feu à partir de 21 heures
depuis samedi a provoqué l’incompréhension et la colère chez les professionnels
du spectacle vivant et du cinéma. Le gouvernement reste sourd à leurs
revendications.
En quelques heures, beaucoup de théâtres
ont modifié leurs horaires, multiplié les matinales pendant les week-ends, mais
le compte n’y est pas. Déjà restreintes dans l’accueil du public pour respecter
les distanciations sanitaires, certaines scènes parisiennes ont dû se résoudre
à annuler les représentations de 21 heures faute de créneaux horaires
disponibles. Quant aux théâtres de la banlieue, c’est un coup fatal qui les
prive de bon nombre de leurs spectateurs et abonnés. Côté cinémas, on sait que
les deux séances du soir représentent 40 % de leur chiffre d’affaires.
Tous, employeurs comme syndicats,
s’indignent de l’absence de concertation. D’ores et déjà, la CGT spectacle
prévient que le plan de relance « est désormais caduc. Il faut un plan
d’adaptation ». Les rallonges annoncées ne suffiront pas à remettre à flot
un secteur fortement sinistré. D’autant que le gouvernement refuse de les
flécher. Le Syndeac (syndicat des employeurs du spectacle public) parle
d’un « véritable coup de grâce pour le monde culturel ». Olivier
Py, directeur du Festival d’Avignon, d’ « un paysage apocalyptique ».
Samuel Churin, acteur, estime que « pour blesser très fortement, voire
mortellement, le spectacle vivant, il n’y a pas mieux ». Combien
d’artistes, de techniciens sur le bord du chemin ? Depuis le printemps, le
secteur culturel est à la peine. Les plus fragiles encore plus fragilisés. Les
plus précaires encore plus précarisés. Les spectacles, les tournages à l’arrêt
et c’est tout le système qui vacille, faute de rentrée des cotisations
sociales. L’année blanche pour les intermittents jusqu’en août 2021 ne résoudra
pas l’avenir. Combien atteindront leurs 507 heures nécessaires à
l’ouverture des droits d’ici là ? « Le gouvernement a fait beaucoup
d’annonces mais aucune n’est suivie des faits », explique Denis Gravouil,
de la CGT, qui dénonce « une spirale de la pauvreté » et
appelle à la mobilisation unitaire avec une première assemblée générale, ce
soir, à 18 heures au Théâtre Traversière, à Paris.
Tous sont conscients de la gravité de la situation.
Personne ne prétend braver les consignes de protection sanitaire. Comme
l’écrivait Jack Ralite, « on a l’impression que beaucoup d’hommes et de
femmes des métiers artistiques sont traités comme s’ils étaient en trop dans la
société. On nous répond “c’est la crise ”. La
crise ne rend pas la culture moins nécessaire, elle la rend au contraire plus
indispensable. La culture n’est pas un luxe dont en période de disette il
faudrait se débarrasser, la culture c’est l’avenir, le redressement,
l’instrument de l’émancipation. C’est aussi le meilleur antidote à toutes les
pensées régressives sur l’homme ». Remplacez le mot crise par le mot virus.
Le mot disette par pandémie…
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