mardi 29 septembre 2020

Sénat. « Les élus locaux ont le sentiment d’être hors-jeu »


Dimanche, Marie-Claude Varaillas a été élue sénatrice PCF de Dordogne. Rassemblement à gauche, défense des campagnes,… entretien à l’aube de son mandat.

Vous êtes la première femme et la première communiste élue sénatrice en Dordogne depuis 1948. Que dit, cette double première fois du paysage politique dans votre circonscription ?

MARIE-CLAUDE VARAILLAS Je suis en effet la première sous la Ve République, la dernière sénatrice était aussi une communiste, Jeanne Vigier, entre 1946 et 1948. La Dordogne a toujours voté majoritairement à gauche. Ce qui a été aussi historique cette fois, c’est que, pour la première fois, le Parti socialiste et le Parti communiste ont trouvé un accord victorieux pour les sénatoriales (le PS Serge Mérillou a également été élu sénateur – NDLR). L’objectif, maintenant, est de reconduire cette alliance pour garder le département à gauche lors des prochaines échéances.

Uniquement avec le PS ou avec d’autres forces de gauche ?

MARIE-CLAUDE VARAILLAS Nous devons agrandir l’alliance à toutes les forces de gauche qui le veulent. Si les Verts ne s’étaient pas retirés au second tour des sénatoriales, je n’aurais pas été élue par exemple. De toute façon, nous devons avancer ensemble pour préparer une alternative pour les échéances à venir. Y compris pour 2022, cela se joue dès maintenant. On voit bien qu’Emmanuel Macron et Marine Le Pen veulent se retrouver à nouveau l’un en face de l’autre.

Quelles sont les remontées de terrain que vous avez pu recueillir auprès des élus locaux durant la campagne ?

MARIE-CLAUDE VARAILLAS Les réformes successives – sur les grandes régions, les intercommunalités, les transferts de compétence – ont donné le sentiment aux élus locaux d’être hors-jeu. Ils craignent que leurs communes deviennent des coquilles vides. Il y a, dans notre ruralité, un véritable sentiment de relégation et d’abandon. L’État, vertical, vide les campagnes de ses services publics. Cela s’y traduit par une montée du vote extrême ou par l’abstention. Le mouvement des gilets jaunes en était aussi un symbole. En organisant le territoire autour des métropoles, on a fragilisé la ruralité. Près de chez moi, Bordeaux prend entre 20 000 et 30 000 habitants par an. En Dordogne, nous avons un solde naturel négatif qui est à peine compensé par le solde migratoire. Les jeunes partent, du fait de la désertification médicale, du manque d’attractivité.

Quelles sont les priorités de votre mandat ?

MARIE-CLAUDE VARAILLAS Je veux affirmer haut et fort que la décentralisation ne doit pas rimer avec moins d’État sur les territoires. Nous allons être particulièrement attentifs à la fameuse loi « 3D » (décentralisation, différenciation, déconcentration). Je me méfie du mot « différenciation ». Notre République doit rester une et indivisible. S’il s’agit de tenir compte de la spécificité des territoires ruraux, oui. Mais il ne faut pas rompre l’égalité entre les citoyens. Nous devons travailler à améliorer l’accès aux services publics et à mieux répartir la dotation globale de financement entre les territoires.

Le Sénat est-il un contre-pouvoir à la politique d’Emmanuel Macron ?

MARIE-CLAUDE VARAILLAS D’abord, les sénateurs contrôlent l’action du gouvernement, on l’a vu avec les commissions parlementaires sur l’affaire Benalla, sur la crise sanitaire… Et nous pouvons faire des propositions de loi. C’est le groupe CRCE qui a proposé l’augmentation de l’aide personnalisée au logement par exemple. Enfin, nous faisons remonter ce qui ne va pas. Je compte bien dénoncer la fracture territoriale qui existe dans notre pays.

 

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