mercredi 30 septembre 2020

« Insécurité », l’éditorial de Sébastien Crépel dans l’Humanité de ce jour.


L’insécurité qui rend impossible le simple fait de se soigner ou de se nourrir correctement, et que la crise du Covid a encore aggravée, n’est pas moins préoccupante ni plus vivable que celle qui menace la tranquillité des rues. Mais elle fait moins la une de certains journaux, et n’est guère le prétexte à la surenchère politique. D’un côté, on ne s’en plaindra pas : qu’elle soit sociale ou qu’elle concerne l’intégrité des personnes et des biens, l’insécurité devrait être toujours considérée comme un sujet trop grave pour servir de matériau aux basses manœuvres politiciennes. De l’autre côté, cette sous-estimation de l’urgence sociale révèle combien les préoccupations de ceux qui s’en désintéressent pour se focaliser sur les questions dites « sécuritaires » n’ont que peu à voir avec l’intérêt général, mais beaucoup plus avec une entreprise de division qui ne dit pas son nom, propice aux pires amalgames, comme on peut encore le craindre avec le prochain discours présidentiel sur le « séparatisme ».

 

Pourquoi n’entend-on pas le Rassemblement national, les députés de la majorité ou les figures de l’opposition de droite s’offusquer, avec la même vigueur dont ils sont capables dès qu’ils aperçoivent le bout d’un foulard sur la tête de l’une de leurs compatriotes, du risque de déchirure de la devise républicaine que fait peser le dénuement d’une large fraction de Français de tous âges et de toutes origines ? Poser la question, c’est y répondre. Il est toujours plus risqué de proposer de désigner les responsables des inégalités. Les pauvres risqueraient de tourner leur colère vers les vrais profiteurs et, qui sait, d’unir leurs forces pour en finir avec le scandale d’un pays dans lequel la peur de la misère est désormais le bien le mieux partagé.

 

C’est la force du baromètre du Secours populaire d’imposer dans le débat l’évidence de la fracture des inégalités. Cela donne des éléments à chacun pour reposer le débat qui vient sur le « séparatisme » sur de nouvelles bases. À l’instar de l’extrême polarisation des richesses qui mine la cohésion de la société.

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