Une offre de reprise examinée lundi dernier permettrait aux actionnaires d’engager le rachat de leur entreprise d’ameublement, en supprimant près d’un millier d’emplois.
Si la décision définitive ne sera pas
prononcée avant le 14 septembre, il existe peu de doutes quant à l’issue
du jugement pour l’entreprise Alinéa. Lundi, la candidature de l’unique
repreneur potentiel de la firme d’ameublement, qui n’est autre que celle de
l’actuel propriétaire, Alexis Mulliez, et l’Association familiale Mulliez
(AFM), a été examinée par le tribunal de commerce de Marseille.
Une opération immobilière en cause
« Il ne faut pas avoir trop d’espoir », estime Eddy Chhlang, délégué CGT dans l’entreprise, « nous
allons perdre 1 000 emplois, parce qu’il n’y a pas d’autre alternative
pour la marque que celle proposée par les actuels actionnaires ». Alinéa
est l’une des principales firmes d’ameublement en France. Avec
1 800 employés et 26 magasins, dont 4 franchisés, la firme avait
dû faire face à de sévères difficultés depuis l’arrivée de la famille Mulliez
aux commandes de l’entreprise, en 2017. Dans un rapport confidentiel du
tribunal consulté par Libération, les experts dénoncent
d’ailleurs avec sévérité les choix de la direction qui ont contribué à
fragiliser l’entreprise au cours des dernières années. Une opération
immobilière visant à céder la propriété de ses murs à l’entreprise Aline Immo
est notamment en cause. Cette dernière aurait privé l’entreprise de ressources
financières importantes en cas de difficulté. Même si, lorsque la société a été
placée en redressement judiciaire, en mai dernier, la direction a préféré
blâmer la crise des gilets jaunes et les manifestations anti-réforme des retraites.
Un décret d’aubaine pour la famille Mulliez
Dans cette situation, la crise sanitaire a
bon dos, et le futur rachat d’Alinéa distille comme un parfum d’aubaine pour
les actuels actionnaires. Cette offre de reprise a en effet été rendue possible
par l’ordonnance du 20 mai, qui autorise le propriétaire d’une entreprise
en faillite à la racheter devant le tribunal de commerce. Résultat d’une
politique destinée à limiter les retombées négatives de l’après-Covid, ce
mécanisme permettrait, selon le gouvernement, de limiter la casse dans les
secteurs durement touchés par la crise sanitaire. Mais les dirigeants d’Alinéa
semblent profiter de cet outil pour restructurer à peu de frais l’entreprise
endettée, mettant du même coup un millier d’emplois en jeu. Une nouvelle qui
passe mal pour les salariés, sachant que le patrimoine familial des Mulliez,
sixième fortune de France, est estimé à 26 milliards d’euros par le
magazine Challenges.
Quel avenir pour les salariés d’Alinéa ?
Pour le délégué syndical CGT, il n’y a pas de quoi
être optimiste. « Avec seulement 9 magasins conservés, on peut
s’inquiéter de l’avenir de la firme par rapport aux autres concurrents. » De
son côté, la direction de l’entreprise affiche son désir de « réaffirmer
la marque et de la relancer » sur le secteur de l’ameublement. L’offre
formulée par Mulliez risque au contraire d’empêcher la progression de
l’entreprise face à ses plus gros concurrents, Ikea et Conforama. Quel avenir,
alors, pour les quelque 800 salariés que le plan de reprise aura
épargnés ? Une audience est prévue à l’été prochain, afin d’évaluer la
situation de l’entreprise au lendemain du plan de reprise.
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