Plus l’immensité de la catastrophe qui a dévasté le Liban se découvre, plus
manquent les mots pour la décrire. Le champignon noir et orange qui est monté
dans le ciel de Beyrouth ressemble à l’apocalypse qui s’abat sur un pays dans
lequel un habitant sur deux vit en deçà du seuil de pauvreté, aux coupures
d’électricité quotidiennes, avec un système scolaire effondré, des ordures
ménagères qui s’entassent, une monnaie nationale vidée de sa valeur alors que
les prix des produits de première nécessité s’envolent et que le système
bancaire est en faillite, aspiré par les élites financières. Tout ceci, au
moment où la pandémie du Covid-19 redouble de vigueur. Cette sanglante
explosion est le révélateur de l’implosion d’un système politique disqualifié,
détesté, rejeté et d’un état de pourrissement avancé, des institutions minées
par le clanisme et la corruption : « une classe dirigeante qui ne
dirige que ses propres intérêts et les intérêts de ceux qui l’ont placée à la
tête du pays », comme l’écrit avec tant de force le comédien et
metteur en scène Wajdi Mouawad.
Le peuple libanais – et à ses côtés les réfugiés palestiniens et syriens –
a beau être habitué aux épreuves, aux guerres, aux morts, aux disparitions, aux
misères et aux exils, il ne pourra s’en sortir sans notre aide. Sans notre
solidarité agissante, financière et politique. L’Humanité s’associe
au Secours populaire français pour vous proposer d’organiser autour de vous des
collectes de dons. Cet argent sera remis directement à celles et ceux qui en
ont besoin grâce à l’organisation sœur du Secours populaire au Liban.
Le cataclysme du 4 août assomme des familles, affaiblit encore une
population à bout de force. L’aide financière est indispensable et la
solidarité des États ne doit pas manquer, à condition que l’argent ne soit pas
détourné et serve réellement à panser les plaies et à reconstruire. De ce point
de vue, une conférence des donateurs, sous l’égide de l’ONU, et une
mobilisation des banques centrales avec un contrôle strict de l’utilisation des
fonds est indispensable. Mais c’est le peuple, qui a encore puissamment
manifesté samedi dernier, qui doit pouvoir être maître de son avenir. En ce
sens, une tutelle du Fond monétaire international conditionnant les aides à
plus d’austérité et de destruction des services publics ne ferait qu’ajouter du
malheur au malheur. De même, tout ce qui prendrait l’allure d’une ingérence
étrangère est à bannir. Le pays n’en a que trop souffert.
Le peuple libanais a besoin qu’on l’aide
vite à étancher sa soif de justice, pas qu’on se substitue à lui. L’un des
premiers actes pour ce faire est de lui permettre d’accéder à la vérité sur
cette catastrophe. Une commission d’enquête internationale, indépendante,
transparente, avec des inspecteurs nommés par les Nations unies, doit le
permettre. On aidera les Libanais à prendre leur destin en main en contribuant
à ce qu’ils se libèrent de ceux qui étouffent leur pays depuis si longtemps et
les ruinent. Ils ont donc besoin que le pays du cèdre ne soit plus enserré dans
les tenailles des grandes puissances mondiales pour leurs intérêts
géopolitiques et économiques. La France devrait se placer de ce côté, celui de
l’intérêt général contre les grands prédateurs internationaux qui ne manqueront
pas de profiter du martyre de Beyrouth. L’Humanité va
continuer d’informer sur ces enjeux et prend le parti du peuple et de la
jeunesse libanaise pour la justice et le renouveau. Ils sont debout. Nous
sommes à leurs côtés. Solidarité Liban !
Par Patrick Le Hyaric
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