Le parc à thème a été autorisé à
rassembler 9 000 spectateurs le 15 août, en dérogation à
l’interdiction de réunir plus de 5 000 personnes, prolongée jusqu’au
30 octobre, sur fond d’amitié entre de Villiers et Macron.
Le Puy du Fou bénéficie-t-il de passe-droit et d’un traitement de faveur ?
La préfecture de Vendée a autorisé le parc à thème à accueillir jusqu’à
9 000 personnes pour la soirée du 15 août. Tel a été le cas à
l’occasion du spectacle nocturne de la Cinéscénie, alors même que
l’interdiction de rassembler plus de 5 000 personnes a été prolongée
jusqu’au 30 octobre, face à l’épidémie de Covid-19. Cette « dérogation
exceptionnelle », justifiée par un « niveau de vulnérabilité
limitée » sur ce territoire, selon la préfecture, intervient alors que
la réouverture du parc, le 11 juin dernier, avait déjà fait l’objet d’une
polémique. Philippe de Villiers, le créateur du Puy du Fou, s’était alors vanté
d’avoir reçu un SMS du président de la République autorisant le retour du
public. En juillet, le parc avait également bénéficié d’une autre dérogation
lui permettant d’accueillir 12 000 personnes d’un coup, réparties en trois
tribunes de 4 000 spectateurs.
L’Élysée a démenti toute intervention
Face à l’émotion suscitée devant ces largesses refusées à d’autres (la
requête visant à rassembler 10 000 personnes pour la rencontre de football
entre Bordeaux et Nantes a par exemple été rejetée vendredi), l’Élysée a
démenti toute nouvelle intervention. Pour sa défense, Emmanuel Macron a fait
savoir au JDD qu’il était « surpris » par la
décision de la préfecture de Vendée, appelant au passage à « la
vigilance et à l’équité ». Mais sa proximité plusieurs fois affichée
avec Philippe de Villiers, couplée au SMS rendu public en juin, alimente de
fait les accusations de favoritisme. La situation du Puy du Fou symbolise
ainsi « un grand bras d’honneur au monde de la culture », selon
le sénateur PS David Assouline, quand communistes, écologistes, insoumis et
socialistes dénoncent une forme de « fait du prince », alors
même que les festivals ont été interdits ou annulés, et les salles de théâtre
et de concert soumises à des règles drastiques.
L’idylle entre Emmanuel Macron et Philippe de Villiers ne date pas d’hier.
En août 2016, quelques jours avant de démissionner de son poste de ministre de
l’Économie pour se lancer dans la campagne présidentielle, l’hôte actuel de
l’Élysée s’affichait tout sourire aux côtés du fondateur du Puy du Fou. Sur le
site du parc, le futur président lançait : « L’honnêteté m’oblige à
vous dire que je ne suis pas socialiste », avant de monter sur un
quadrige, char antique à deux roues, attelé de quatre chevaux, pour un tour de
piste princier. Mais ce n’est pas tout :
Emmanuel Macron partage également des sentiments royalistes et monarchistes
avec Philippe de Villiers. Un an avant de se rendre au Puy du Fou, il se
confiait au sujet d’un « absent ». « Dans la politique française, cet
absent est la figure du roi, dont je pense fondamentalement que le peuple
français n’a pas voulu la mort. La Terreur a creusé un vide émotionnel,
imaginaire, collectif : le roi n’est plus là ! On a essayé ensuite de
réinvestir ce vide, d’y placer d’autres figures : ce sont les moments
napoléonien et gaulliste, notamment. Le reste du temps, la démocrat ie
française ne remplit pas l’espace. »
En l’entendant, Philippe de Villiers, qui
répand au Puy du Fou une réécriture de l’histoire doublée d’une propagande
antirépublicaine, était sans doute aux anges. Tout comme quand son fils Nicolas
de Villiers, qui préside la SAS Grand Parc du Puy du Fou et la SAS Puy
du Fou International, a pu rouvrir le parc avant tout le monde. Fort de très
nombreux bénévoles dévoués, le site attirait 2,3 millions de visiteurs en
2018, pour un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros. S’il propose des
spectacles de grande qualité, du point de vue des décors, de la mise en scène
et des cascades, le Puy de Fou véhicule par contre une idéologie réactionnaire,
une défense à sens unique du catholicisme, et des mensonges historiques au
sujet d’un prétendu génocide vendéen pendant la Révolution française, inventé
de toutes pièces par les antirévolutionnaires et largement diffusé par de
Villiers. De quoi doublement s’interroger sur les faveurs réservées au parc par
Emmanuel Macron…
Aurélien Soucheyre
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