Au cœur de la crise du coronavirus, certains s’illusionnaient autour des
promesses de « virage écologique et social » et d’une fin de
quinquennat teintée de gauche. Emmanuel Macron a douché ces maigres espérances.
En nommant à Matignon Jean Castex, un technocrate sans poids politique,
classique conservateur venu de LR, le chef de l’État expédie un message clair :
le « nouveau chemin » jusqu’à 2022 penchera résolument à
droite et sera tracé au plus près par le locataire de l’Élysée, qui compte bien
serrer la bride à l’exécutif. L’aile gauche de la Macronie peut aller compter
ses échecs. Le prétendu équilibre politique du « en même temps », avec
lequel l’actuel président a construit sa victoire de 2017, est rangé
définitivement sur l’étagère des slogans de campagne. À côté des vagues
promesses de démocratie participative et autre « nouveau monde ».
De fait, en guise de renouvellement des pratiques, on assiste avec ce
remaniement à une nouvelle étape d’hyper-présidentialisation. Une concentration
du pouvoir encore jamais vue. Inconnu du grand public, sans assise partisane et
donc sans réelle influence, Jean Castex, aussi brillant technicien du
déconfinement soit-il, jouera surtout l’exécutant zélé des volontés élyséennes.
Un « collaborateur », disait en son temps Nicolas Sarkozy à propos
de François Fillon. L’énarque le sait bien : « Je ne suis pas là pour
chercher la lumière mais pour chercher des résultats », dit-il. Après
avoir été le serviteur de l’État, il sera le serviteur d’un chef de l’État qui
entend bien faire de Matignon une succursale de l’Élysée.
En prenant les commandes, Emmanuel Macron,
en berne dans les sondages, se met en ordre de bataille pour la prochaine
présidentielle. Les résultats des municipales ont fini de le convaincre. Il a
déçu définitivement une grande partie des électeurs de gauche. Décrédibilisé
sur les questions écologiques et sociales, le chef de l’État privilégie donc la
stratégie qui lui a réussi le mieux jusqu’ici : continuer de fracturer la
droite. En ralliant dans les ministères quelques figures LR. Et en donnant des
gages à l’électorat conservateur. Jean Castex a déjà promis de boucler au plus
vite le Ségur de la santé. Et de remettre sur le métier la réforme des
retraites. De quoi inquiéter.
Par Laurent Mouloud

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire