mercredi 27 mai 2020

« NOUVELLE DONNE », L’ÉDITORIAL DE MAURICE ULRICH DANS L’HUMANITÉ DE CE JOUR !



 Il est des assertions d’autant plus définitives qu’elles habillent un gros mensonge. Le Figaro, évoquant la crise, refuse tout net une augmentation des impôts, « cet éternel réflexe pavlovien », avec cet argument ­péremptoire : « Comme si un tour de vis fiscal avait un jour sauvé le moindre emploi… » Ah bon ?

Au début des années 1930, le New Deal, lancé par Roosevelt, qui a sorti les États-Unis de la Grande Dépression et redonné du travail aux Américains, a été soutenu par une taxation à 90 % des plus hauts revenus. Ce que rappelait d’ailleurs, dans un entretien au Journal du dimanche, le prix Nobel d’économie Esther Duflo, qui déclarait en même temps : « Selon moi, l’ISF n’aurait pas dû être supprimé, dans un contexte d’augmentation mondiale des inégalités. S’il y a une possibilité de le rétablir, faisons-le. » Elle n’est pas la seule, bien sûr, mais ça mérite d’être dit. Car, on a bien compris, ce n’est pas des impôts en général qu’il s’agit, comme pour Gérald Darmanin quand il déclarait, dimanche : « Augmenter les impôts, ce serait décourager le travail et l’activité économique. »

En fait, un spectre hante certaines rédactions, pas seulement au Figaro, et les allées du pouvoir. C’est la nécessité redoutée d’une véritable politique sociale comme outil de la relance. Sans doute Emmanuel Macron et le gouvernement sont-ils amenés à des concessions qu’ils vont tenter de mesurer au plus juste. Mais il n’est pas question de primes, de médailles et de quelques paroles vertes pour accompagner la stratégie des grands groupes de l’automobile.

Le défi d’aujourd’hui, pour la France comme pour l’Europe, où les 500 milliards dont on parle tant ne peuvent pas faire illusion tant que la même politique est maintenue, c’est celui du progrès social et écologique. Cela passe par l’augmentation des salaires, la réduction du temps de travail, la démocratie dans les entreprises, de nouvelles manières de produire qui s’affranchissent de la quête du profit. Aujourd’hui, le secteur qui repart le plus vite, c’est celui du luxe ! Changer, c’est l’exigence à faire grandir, pour la justice et parce que, sans cela, il n’y aura pas de sortie de crise.


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